Awal---Pierre Bourdieu

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Résumé


Entre amis Pierre Bourdieu L’auteur évoque, à l’intention des jeunes chercheurs, ses premiers pas dans la recherche en sociologie et en ethnologie, deux disciplines considérées comme antagoniques mais dont il tentera de dépasser l’opposition malgré les difficultés rencontrées dans un champ scientifique dominé par une vision très limitée de la recherche. À l’exception de quelques chercheurs isolés (Dermenghem, Jacques Berque, André Nouschi), la plupart ont inscrit leur démarche soit dans un orientalisme folklorisant soit dans une ethnologie fondée sur l’archaïsme telle qu’elle était pratiquée à l’université d’Alger. C’est dans ce cadre que Pierre Bourdieu fait son immersion dans la recherche sur le monde urbain d’abord et le monde rural ensuite. La connaissance des deux univers l’amène à s’interroger sur les conduites de la paysannerie, du prolétariat et du sous-prolétariat, voués à la «tradition du désespoir» des jours sans lendemain. Son adaptation à la société algérienne lui permet de percevoir l’avenir de l’Algérie autrement que les intellectuels (algériens et français de gauche) qui projettent sur leurs sociétés des modèles politiques en totale inadéquation avec la réalité vécue. Ce témoignage sur sa propre démarche participe de la réflexivité nécessaire à toute entreprise scientifique permettant ici de saisir les liens entre l’observateur et son objet.



RÉSUMÉS

Entre amis
Pierre Bourdieu

L’auteur évoque, à l’intention des jeunes chercheurs, ses premiers pas dans la recherche en sociologie et en ethnologie, deux disciplines considérées comme antagoniques mais dont il tentera de dépasser l’opposition malgré les difficultés rencontrées dans un champ scientifique dominé par une vision très limitée de la recherche. À l’exception de quelques chercheurs isolés (Dermenghem, Jacques Berque, André Nouschi), la plupart ont inscrit leur démarche soit dans un orientalisme folklorisant soit dans une ethnologie fondée sur l’archaïsme telle qu’elle était pratiquée à l’université d’Alger. C’est dans ce cadre que Pierre Bourdieu fait son immersion dans la recherche sur le monde urbain d’abord et le monde rural ensuite. La connaissance des deux univers l’amène à s’interroger sur les conduites de la paysannerie, du prolétariat et du sous-prolétariat, voués à la «tradition du désespoir» des jours sans lendemain. Son adaptation à la société algérienne lui permet de percevoir l’avenir de l’Algérie autrement que les intellectuels (algériens et français de gauche) qui projettent sur leurs sociétés des modèles politiques en totale inadéquation avec la réalité vécue. Ce témoignage sur sa propre démarche participe de la réflexivité nécessaire à toute entreprise scientifique permettant ici de saisir les liens entre l’observateur et son objet.

Pierre Bourdieu et l’anthropologie du Maghreb
Abdallah Hammoudi

Abdallah Hammoudi tente de situer la contribution de Pierre Bourdieu à l’anthropologie dans le champ scientifique des années cinquante. À la lecture de cet article, il apparaît que l’anthropologie du Maghreb était à l’image de la politique d’alors, c’est-à-dire dominée par la fragmentation sociale (cantons, villes, tribus), fragmentation religieuse (islam/paganisme), enfin fragmentation politique (pouvoir central/périphérie). En effet, à l’exception de Jacques Berque, de nombreux chercheurs sont tombés dans le jeu de la vision coloniale et colonialiste. Après avoir brossé un tableau des pratiques scientifiques des anthropologues de la colonisation, Abdallah Hammoudi montre comment Pierre Bourdieu a non seulement évité de tomber dans les travers de la science de l’époque mais aussi a ouvert de nouvelles pistes dans la connaissance des sociétés maghrébines présentées comme des sociétés dotées d’une dynamique propre et non plus comme des groupes figés.
Que ce soit à travers ses études sur l’honneur ou sur les stratégies de parenté, ses travaux innovent par rapport à ses prédécesseurs ou ses contemporains qui ont étudié la société maghrébine, dans la mesure où « il se démarque d’une approche tout entière tournée vers une mécanique de la forme, de la structure et de la fonction. [...] Le changement radical qu’il introduit concerne la description de la manière dont les groupes construisent des dispositions propres en fonction des horizons ouverts ou fermés à eux par leur environnement matériel et social et de la manière dont ces dispositions travaillent à la restructuration de cet environnement lui-même ». En ce sens, les concepts de structure et de fonction sont insuffisants à rendre compte de la réalité, car elles enferment les comportements dans des schémas figés qui ne laissent pas de place à la créativité humaine. Hammoudi termine sur la dimension novatrice et engagée de l’œuvre de Pierre Bourdieu qui, grâce aux clés décisives qu’elle fournit rappelle à tous la nécessité d’explorer les voies nouvelles qu’il a su ouvrir.

Les grandes théories anthropologiques des années soixante à nos jours
Sherry B. Ortner

Cet article tente d’établir une périodisation de l’histoire récente de l’anthropologie : phase culturaliste, phase structuraliste et phase dite théorie de la pratique. Alors que les deux premières considèrent « la société (ou la culture) comme une réalité objective, avec sa dynamique propre échappant essentiellement à l’influence humaine », la théorie de la pratique, mise en œuvre par Bourdieu et les anthropologues anglo-saxons, tente de répondre à la question de savoir « dans quelle mesure la société et la culture sont le fruit de la pensée et de l’action humaines. Par les réponses qu’elle apporte à cette interrogation, l’anthropologie des années quatre-vingt commence à prendre tournure [...] sans pour autant renoncer — dans l’idéal — aux deux autres perspectives». C’est dans cette dernière période que les travaux de Pierre Bourdieu se trouvent ainsi classés à côté de ceux de M. Salhins et d’autres auteurs anglo-saxons. L’apport de la contribution de Sherry Ortner est indéniable s’agissant de la production scientifique américaine et de l’histoire de l’anthropologie, mais elle reste cependant schématique lorsqu’il est question de la France et de l’Europe. Si Pierre Bourdieu est reconnu parmi les chercheurs qui ont contribué à faire avancer l’anthropologie il n’en demeure pas moins que son œuvre est ici sous-analysée puisque l’auteur ne prend pas en compte l’ensemble de ce travail construit au fil des années et des observations de terrain (Algérie 60, Le Déracinement, L’esquisse d’une théorie de la pratique, Le Sens pratique) sur lequel il y aurait beaucoup à dire.

Remarques en marge de l’article de Sherry B. Ortner
Pierre Bourdieu

L’auteur revient sur la classification opérée par S.B. Ortner de son œuvre, d’une part parce que l’anthropologue américaine s’appuie sur un ouvrage datant de 1972 (Esquisse d’une théorie de la pratique) qui ne présentait que très imparfaitement le contenu de sa démarche ; et d’autre part parce qu’elle tient comme acquise l’opposition entre l’objectivisme « structuralo-marxiste » et le subjectivisme sartrien. En réalité Pierre Bourdieu affirme vouloir dépasser cette catégorisation peu fructueuse : « A l’objectivisme sans agent et au subjectivisme concevant l’action comme produit d’une intention consciente », il tente d’ opposer une théorie de la pratique comme produit d’un sens pratique, d’un sens du jeu dénommé habitus. L’auteur fait référence à un système de dispositions qui sont le produit de l’incorporation des structures. Cette mise au point s’accompagne d’une mise en perspective des différents concepts forgés par l’auteur que le lecteur pourra trouver dans Le Sens pratique (Paris, Minuit, 1980).
 
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