BERBERES

achelhey

New Member
BERBERES,
BERBERITÉ
ET BERBERITUDE



(Compte-rendu d'un colloque organisé sur la culture amazighe au début des années quatre vingt)

Z.D. Lamalif N° : 31, décembre/janvier 81/1982



Que le berbère soit un des plus vieux fonds de l’humanité, le président Senghor en a encore donné la preuve lors d’une conférence organisée par l’association culturelle Amazigh à Rabat, en novembre. Et ce à trois niveaux:

Celui de l’histoire, d’abord. Pour les Grecs dont Hérodote a perpétué les pensées, était berbère, c’est-à-dire barbare, mais sans aucune connotation, tout ce qui n’était pas grec. L’Afrique toute entière était berbère et si l’on y distinguait des Égyptiens (d’ailleurs appelés Libyens), des Éthiopiens et des Maures, c’était au vu des nuances de leur couleur de peau. On leur trouvait d’ailleurs de grandes ressemblances avec les gens du Caucase et les habitants de l’Asie et on reconnaissait qu’ils avaient fondé la première des grandes civilisations, celle de la Haute Égypte.

Celui de l’homme primitif dans le sens inverse du sud au nord, ce qui est plus probant que la couleur de la peau, déterminée par le climat. On y trouve donc la confirmation d’un très fort métissage dans tout le pourtour de la Méditerranée, lieu de naissance des premières et des plus grandes civilisations.

Celui de la langue enfin qui est "le fondement de l’identité", pour le président Senghor, encore que comme l’a dit M. Moattassime, professeur "même lorsque la langue disparaît, l’âme demeure". Il y a en effet, les langues à fluxions comme l’arabe, le français et toutes les langues indo-européennes et sémites, les langues à tons des chinois et les langues agglutinantes comme le berbère, le wolof, le basque, le ligure, le japonais, le coréen, le cambodgien, l’ancien égyptien, le bantou, le malais, l’océanien, l’indonésien, etc. Cela engendre une poésie et un chant polyphonique alors qu’en Europe, il est monolique.

Il faut aussi considérer le niveau des types de sociétés, patriarcal chez les indo-européens et les sémites, matriarcal partout ailleurs et spécialement en Afrique, chez les Berbères et les Basques.

Pour le président Senghor, il faut recouvrer l’identité culturelle et l’enraciner dans les vertus des civilisations africaines, dans la négritude et la berbéritude, dont les esthétiques se ressemblent ; il faut créer un institut du berbère au Maroc, où viendront des étudiants sénégalais ; il faut aussi apprendre le berbère, et, comme cela se passe en Scandinavie et au Sénégal, dés les premières années de sa scolarité. "Vous devez porter et assumer la berbéritude comme nous assumons la négritude. Vous devez en avoir la volonté politique" a dit le président Senghor aux quelques 250 cadres et élites politiques berbères présentes.

C’est aussi ce qu’Ahardane, chef du Mouvement populaire, a prôné en rappelant que deux instituts étaient acceptés en principe, l’un sur la recherche et l’étude de la langue berbère et l’autre sur la sauvegarde des arts et expressions populaires, mais en soulignant qu’il fallait par les Berbères, ne serait-ce qu’en famille:

"Qui peut assumer cette berbéritude, Si ce n’est les berbères eux-mêmes ? Aujourd’hui, avec l’acculturation, l’exode rural et les progrès de la scolarisation, notre culture est menacée. Il faut l’assumer et consentir pour elle des sacrifices. Il faut les forcer à accepter notre berbérité."

Globalisant le débat avant qu’il s’annonce, le président de l’association M. Zemmouri, avait dit : "la diversité s’enracine dans l’humus des particularismes."
 
Back
Top