Entretien avec la chanteuse amazighe Rayssa Fatima Tabaâmrant : «Il est malheureux que l'art soit vidé de son contenu»
C'est dans sa maison de Dchira à une dizaine de kilomètres de la ville d'Agadir, au milieu de sa famille, que Rayssa Fatima Tabaâmrant nous a reçu. Selon Mohamed El Khatabi, président de la section régionale du syndicat marocain des professions musicales, qui assistaient à notre entretien, Rayssa Tabaâmrant a appris le « métier » de ses maîtres aujourd'hui décédés, Saîd Achtouk et El Hadj Mohamad Demsiri.
Qui est Rayssa Fatima Tabaâmrant ?
J'appartiens à la tribu des Aït Baâmrane. Mon enfance n'a pas été heureuse. J'ai très tôt perdu ma mère et j'étais obligée de vivre entre ma belle-mère et mes tantes. Mais grâce à Dieu, j'ai pu surmonter tous les problèmes. Cependant, le décès de ma mère m'a beaucoup marqué. Ma première chanson était pour elle et sur sa vie. Cette chanson m'a permis d'exprimer ma douleur et mes souffrances. J'avais alors l'âge de 13 ans.
Ce thème est présent dans toutes mes créations artistiques, car je considère que l'orphelin reste, du point de vue sentimental, toujours un enfant. Mon premier album dans ce sens, je l'ai enregistré en 1985.
J'ai appris à lire et à écrire grâce au journaliste correspond du journal «Assahra Al Maghribia », M. Rachid Abdelouahed, qui m'a offert l'opportunité de prendre contact avec les associations.
Un grand tableau portrait d'El Hadj Belaîd est accroché au mur du salon des hôtes. Que représente pour vous feu El Hadj Belaîd ?
El Hadj Belaîd est le père spirituel de l'art et de la chanson classique amazighe dans la région de Souss. Il était connu par son patriotisme à l'époque de la colonisation. Ses chansons étaient très engagées. El Hadj Belaîd était à la fois l'un des grands compositeurs, paroliers et chanteurs de la région. Le contenu de ses poèmes classiques m'a beaucoup aidé dans la valorisation de mes morceaux musicaux enregistrés jusqu'à présent. Vous savez que la parole ciblée reste gravée dans les mémoires tandis que la composition disparaît rapidement. Malheureusement, on constate que l'art est vidé de son contenu. Il est devenu une matière commerciale.
Quand avez-vous été consciente pour la première fois de ce rôle important de la parole ?
Dans la composition de mes chansons, je me suis basée sur la poésie classique amazighe. En m'écoutant, les gens se retrouvent dans ce genre de poésie qui narre les paroles d'un tel ou tel patriarche amazigh. Ils trouvent tous les instants de leur vie dans la chanson. J'ai toujours pris pour exemple les gens qui m'ont précédé dans l'écriture de la poésie. J'ai beaucoup appris de mon frère le grand artiste Ammouri Mbark. Professeur de musique, il compose de la musique moderne en employant une méthode traditionnelle. El Hadj Mohamad Demsiri, que Dieu ait son âme, reste mon idole dans la recherche de tout ce que recèle la culture amazighe, qui m'est très proche. Entre nous, il existe une relation profonde. J'ai souvent exprimer mes sentiments réels à travers des vers poétiques.
Au début de votre carrière, avez-vous affronté des difficultés à ce que vous ne chantiez pas ?
Toute ma famille s'opposait à ce que je chante publiquement. L'image de la femme a été ternie à l'époque. J'ai dû quitter le foyer familial pour intégrer librement le domaine de la poésie amazighe. J'ai commencé comme danseuse dans la troupe de Jamaâ El Hamidi. J'ai chanté pour la première fois en 1984, grâce à Rays Mohamad Belfkih qui m'a donné l'occasion d'enregistrer avec lui un album. La danse ne me plaît pas.
Quels sont les thèmes évoqués dans vos chansons ?
J'évoque le décès de ma mère, l'orphelin, l'éducation de l'enfant, la sensibilisation de la femme, la protection de la nature et de l'environnement… Le thème de la femme prend une place de choix dans mes compositions musicales. Car, j'ai toujours considéré que la femme est le cœur de la société. Si ce cœur est sain, toute la société sera saine. Je chante pour cette femme qui ne sait pas lire , mais elle sait écouter. La femme doit être scolarisée pour qu'elle puisse bien éduquer ses enfants.
Le changement constaté aujourd'hui dans le comportement de certaines femmes est regrettable. Il faut savoir que la femme dispose de plus de responsabilités que l'homme. J'ai composé une chanson qui démentit tout ce qu'on raconte de négatif sur la femme. Des gens disent que la femme est un être inférieur. Moi, je dis que ce genre de discours est dépassé. La femme n'est pas née pour être culturellement soumise.
Vous avez dit que votre prochain sera totalement dédié à la femme et à l'apprentissage de la langue amazighe. Comment ce dernier point a-t-il soulevé votre curiosité ?
J'ai remarqué que la méthode d'apprentissage de la langue amazighe dans les établissements scolaires est une méthode inappropriée.
La formation doit d'abord intéresser les cadres avant les élèves. Aussi, les manuels scolaires doivent-ils être révisés.
Propos recueillis par El Mahjoub Rouane
le matin
C'est dans sa maison de Dchira à une dizaine de kilomètres de la ville d'Agadir, au milieu de sa famille, que Rayssa Fatima Tabaâmrant nous a reçu. Selon Mohamed El Khatabi, président de la section régionale du syndicat marocain des professions musicales, qui assistaient à notre entretien, Rayssa Tabaâmrant a appris le « métier » de ses maîtres aujourd'hui décédés, Saîd Achtouk et El Hadj Mohamad Demsiri.
Qui est Rayssa Fatima Tabaâmrant ?
J'appartiens à la tribu des Aït Baâmrane. Mon enfance n'a pas été heureuse. J'ai très tôt perdu ma mère et j'étais obligée de vivre entre ma belle-mère et mes tantes. Mais grâce à Dieu, j'ai pu surmonter tous les problèmes. Cependant, le décès de ma mère m'a beaucoup marqué. Ma première chanson était pour elle et sur sa vie. Cette chanson m'a permis d'exprimer ma douleur et mes souffrances. J'avais alors l'âge de 13 ans.
Ce thème est présent dans toutes mes créations artistiques, car je considère que l'orphelin reste, du point de vue sentimental, toujours un enfant. Mon premier album dans ce sens, je l'ai enregistré en 1985.
J'ai appris à lire et à écrire grâce au journaliste correspond du journal «Assahra Al Maghribia », M. Rachid Abdelouahed, qui m'a offert l'opportunité de prendre contact avec les associations.
Un grand tableau portrait d'El Hadj Belaîd est accroché au mur du salon des hôtes. Que représente pour vous feu El Hadj Belaîd ?
El Hadj Belaîd est le père spirituel de l'art et de la chanson classique amazighe dans la région de Souss. Il était connu par son patriotisme à l'époque de la colonisation. Ses chansons étaient très engagées. El Hadj Belaîd était à la fois l'un des grands compositeurs, paroliers et chanteurs de la région. Le contenu de ses poèmes classiques m'a beaucoup aidé dans la valorisation de mes morceaux musicaux enregistrés jusqu'à présent. Vous savez que la parole ciblée reste gravée dans les mémoires tandis que la composition disparaît rapidement. Malheureusement, on constate que l'art est vidé de son contenu. Il est devenu une matière commerciale.
Quand avez-vous été consciente pour la première fois de ce rôle important de la parole ?
Dans la composition de mes chansons, je me suis basée sur la poésie classique amazighe. En m'écoutant, les gens se retrouvent dans ce genre de poésie qui narre les paroles d'un tel ou tel patriarche amazigh. Ils trouvent tous les instants de leur vie dans la chanson. J'ai toujours pris pour exemple les gens qui m'ont précédé dans l'écriture de la poésie. J'ai beaucoup appris de mon frère le grand artiste Ammouri Mbark. Professeur de musique, il compose de la musique moderne en employant une méthode traditionnelle. El Hadj Mohamad Demsiri, que Dieu ait son âme, reste mon idole dans la recherche de tout ce que recèle la culture amazighe, qui m'est très proche. Entre nous, il existe une relation profonde. J'ai souvent exprimer mes sentiments réels à travers des vers poétiques.
Au début de votre carrière, avez-vous affronté des difficultés à ce que vous ne chantiez pas ?
Toute ma famille s'opposait à ce que je chante publiquement. L'image de la femme a été ternie à l'époque. J'ai dû quitter le foyer familial pour intégrer librement le domaine de la poésie amazighe. J'ai commencé comme danseuse dans la troupe de Jamaâ El Hamidi. J'ai chanté pour la première fois en 1984, grâce à Rays Mohamad Belfkih qui m'a donné l'occasion d'enregistrer avec lui un album. La danse ne me plaît pas.
Quels sont les thèmes évoqués dans vos chansons ?
J'évoque le décès de ma mère, l'orphelin, l'éducation de l'enfant, la sensibilisation de la femme, la protection de la nature et de l'environnement… Le thème de la femme prend une place de choix dans mes compositions musicales. Car, j'ai toujours considéré que la femme est le cœur de la société. Si ce cœur est sain, toute la société sera saine. Je chante pour cette femme qui ne sait pas lire , mais elle sait écouter. La femme doit être scolarisée pour qu'elle puisse bien éduquer ses enfants.
Le changement constaté aujourd'hui dans le comportement de certaines femmes est regrettable. Il faut savoir que la femme dispose de plus de responsabilités que l'homme. J'ai composé une chanson qui démentit tout ce qu'on raconte de négatif sur la femme. Des gens disent que la femme est un être inférieur. Moi, je dis que ce genre de discours est dépassé. La femme n'est pas née pour être culturellement soumise.
Vous avez dit que votre prochain sera totalement dédié à la femme et à l'apprentissage de la langue amazighe. Comment ce dernier point a-t-il soulevé votre curiosité ?
J'ai remarqué que la méthode d'apprentissage de la langue amazighe dans les établissements scolaires est une méthode inappropriée.
La formation doit d'abord intéresser les cadres avant les élèves. Aussi, les manuels scolaires doivent-ils être révisés.
Propos recueillis par El Mahjoub Rouane
le matin