Le Détroit de Gibraltar passe, 9000 ans avant J.C., par une crise majeure. Le paysage du dernier maximum glaciaire disparaît : une grande île et son archipel situés devant les “ colonnes d’Hercule ” sont engloutis par la remontée rapide de la mer. Les populations qui venaient d'évincer les cultures préhistoriques archaïques des côtes du Maghreb , voient leurs territoires insulaires et littoraux disparaître ou se rétrécir. Le réchauffement climatique et la redistribution des troupeaux de grands herbivores signent la fin de "l’âge d’or" des “chasseurs-cueilleurs ”. Ce scénario catastrophique révélé par la Géologie et la Préhistoire renvoie, point par point, à l’essentiel du " Timée", texte évoquant l’engloutissement, il y a 9000 ans, d’une île située devant les colonnes d’Hercule et habitée par une peuplade conquérante. Sans doute faut-il voir dans cette tradition égyptienne, l’écho d'événements "traumatiques" bien réels transmis au seuil de l’Histoire par l’efficace transmission orale des peuples sans écriture. Le mythe de l’Atlantide n’est donc que partiellement imaginaire … .
On voit que le niveau des eaux se stabilise vers 6000 ans avant notre époque actuelle, soit 4000 ans avant JC, selon notre mode de datation habituel. On note deux "accélérations", l'une vers 14.000 - 15.000 BP c'est à dire 12.000 - 13.000 avant JC et l'autre, plus récente vers 11.300 BP, c'est à dire aux alentours de 9300 avant JC. Elle se termine en 11.000 BP, c'est à dire 9000 ans avanr JC. Dans la première phase d'accelération la vitesse de remontée des eaux atteint 3,7 mètres par siècle et dans la seconde 2,5 mètres par siècle. En dehors de ces époques la remontée des eaux s'effectue au rythme de 0,5 à 0,9 mètre par siècle.
Courbe de remontéée de l'eau après la dernière glaciation. Elle doit être lue de droite à gauche.
BP signifie "Before Present".
La carte en noir et blanc publiée aux CRAS est plus parlante et plus documentée.
La partie blanche correspond au niveau minimal de l'océan il y a vingt et un mille ans. L'île faisait alors 15 km sur 4. Les zones qui étaient alors émergées sont couvertes par des hachures. Emerge alors ( 1 ) l'île du Cap Spartel. Au fil de la remontée des eaux celle-ci sera progressivement submergée, en 9000 avant JC ( 11.000 BP ) ce qui correspond au chiffre et à la localisation donnés par Platon. C'est ce qu'a donc découvert Collina-Girard. Actuellement la partie sommitale de l'île Spartel serait accessible sans difficulté à des plongeurs munis de scaphandres autonomes puisqu'elle culmine à - 56 mètres seulement. Ceci a été remarqué par différents sponsors potentiels qui ont proposé l'exploration des lieux. Collina, quant à lui, pense que le récit de Platon, recueilli initialement auprès de prêtres égyptiens a été dramatisé, embelli. En effet si on table sur une remontée des eaux liées à la fonte des glaces on obtient ( première figure ) une vitesse de 2,5 mètres par siècle. Pourtant Platon avait écrit que l'île avait été engloutie durant l'espace d'une nuit. Il manque, dans le texte de la publication des Comptes Rendus à l'Académie un passage que Collina a publié au bulletin de la société Vaudoise de Sciences Naturelles 88. 3 : 323 - 341. Le voici :
La tradition orale actuelle
La mémoire d'évènements anciens traverse les générations chez les peuples sans écriture : en Papouasie et en Nouvelle-Guinée les ethnologues ont relevé la précision de généalogies remontant parfois jusqu'à 14 générations ( Wessner et Al, 1998, p. 28 ). Dans le nord de l'île, le mythe du "temps d'obscurité" renvoie à une éruption volcanique précisément datée au début du XVII° siècle ( Blong 1982, Ballard, 1998 , p.23 ).
Les Anradoy ( Sud-ouest de Madagascar ) ont gardé, sur un millénaire, le souvenir de vertébrés disparus ( Aepironis et lémurens géants ) qui vivaient encore lors de la première occupation de Madagascar vers 1000 BP. C'est probablement cette occupation qui a accéléré la disparition totale de ces espèces dont le déclin était déjà effectif entre 2.300 et 2.000 années BP ( Mahé et Sourdat 1972 ).
Au Cameroun on a relevé des listes généalogiques qui s'étendent sur plus d'un millénaire ( Podlewski 1993 ).
Un océanographe, André Capart nous rapporte que lors d'une campagne limmonologique sur le lac Tanganyka un pêcheur indigène lui avait confié une légende locale. A une époque très ancienne il y aurait eu trois lacs à la place du lac actuel ... Les études géologiques et géophysiques confirmèrent par la suite que le lac Tanganyka, à une époque très ancienne, comportait bien trois cuvettes reliées par des détroits, aujourd'hui noyés. Le souvenir très précis de cette péléogéographie avait donc traversé sans faiblir plus de trois millénaires ! ( Capart 1986, p.10 ).
Au Canada les légendes des Indiens Gitksans renvoient à la fin du Pléiostocène et au début de l'Holocène. Les évènements rapportés ont pu en effet être corrélés avec des faits géologiques attestés : glissements de terrains, éruptions volcaniques, assèchement de lacs. Ces évènements ont été vérifiés et datés entre 6.000 ans BP et 10.000 ans BP ( 4000 à 8000 ans avant Jésus Christ ). Les Indiens renvoient couramment dans ces mythes à un temps avant ou après le déluge ( " Before the flood" ) ( Harris 1997 ). La déglaciation a été dans leur histoire une période charnière puisqu'elle a marqué le moment où le peuplement de leur territoire, enfin libre de glaces, a pu être possible.
Les traditions orales de l'antiquité
La Bible a enregistré des évènements d'il y a 7000 ans, dont on aurait trouvé récemment l'équivalent archéologique en Mer Noire ( Ryan et Al, 1997 , Ballard et Al, 2000, Fortey, 2000 ). Ces mythes du Déluge existent aussi chez les peuples sans écriture de Micronésie (Labeyrie 1985 ) : ils renvoient certainement aux évènements mondiaux et synchrones identifiés par la géologie et qui font basculer le monde glaciaire vers le monde actuel avec des limites de continents complètement transformées.
Jacques Cauvin, spécialiste de la néolithisation au Moyen-Orient retrouve dans le livre de la Genèse les principaux évènements objectifs du passage de l'économie de cueillette à l'économie de subsistance ( agriculture et élevage ). Pour cet auteur ils est "difficile de de ne pas envisager que c'est d'elle ( la Révolution Néolithique ) qu'il puisse s'agir. Si c'est bien le cas il s'agirait d'une transmission orale de plus de 6000 ans dans des textes compilés 900 ans avant Jésus-Christ, pour la Bible" ( Cauvin, 1994 ).
La préhistoire
La préhistoire des chasseurs-cueilleurs contronte avec des conservatismes qui impliquent la transmission de tradictions quasi immuables pendant des millénaires. L'art préhistorique européen en est un excellent exemple puisque transmis ( avec la vision du monde qu'il impliquait ) sans changements majeurs pendant 20.000 ans. Dans la grotte du Parpallo, près de Valence, Jean Clottes a relevé la permanence de rites identiques ( offrandes de plaquettes gravées ou peintes ) pendant 10.000 ans ( 4500 plaquettes dans les couches allant du Gravettien au Magdalénien final inclus ). Comme le constate ce spécialiste de l'art pariétal : "ces comportements témoignent de façon indiscutable de la persistance de la même tradition religieuse sur dix millénaires" ( Clottes, communication verbale et interview, Herbaux, 2002 ).
Si l'ethnographie et la préhistoire nous montrent l'efficacité d ela tradition orale chez les peuples sans écritures et l'aptitude à transmettre sur des millénaires le souvenir d'éléments naturels catastrophiques pourquoi refuserions-nous cette possibilité aux peuples antiques ? Pourquoi une tradition de ce type n'aurai-elle pas pu parvenir aux premiers scribes égyptiens pour être ensuite transmise à Platon ?
La fin de la glaciation : un traumatisme culturel majeur dans l'histoire de l'humanité ?
Dans le détroit de Gibraltar, l'histoire géologique de l'île du Cap Spartel et de son archipel s'ajuste à la tradition rapportée 9000 ans après Platon dans le "Timée" : lieu, date de submersion et géographie coincident. La transcription par des scribes égyptiens, après 5000 ans de transmission orale, a pu être possible dès 4.236 BC ( avant Jésus-Christ ). cette date est celle du premier calendrier basé sur le lever héliaque de Sirius (astronomiquement daté) et celle du début de l'écriture hiéroglyphique ( Lefort 1998 ).
Le "mythe" de l'Atlantide pourrait renvoyer, au moins en partie, et contradictoirement à l'avis de l'opinion actuellement dominante ( Vidal-Naquet 2000 ) à des traditions orales, seuls témoins vers 9000 avant Jésus-Christ de l'écroulement d'un monde en pleine apogée : celui des chasseurs de la fin du paléolithique et de leur univers glaciaire. Il est vrai que la seule certitude est que l'histoire géologique réelle du Détroit raconte une "histoire vraie" proche de celle rapportée par Platon. S'agit-il d'une pure coincidence ( Thivel 2001 ) ou touchons nous ici à l'origine du mythe qui aurait hérité du savoir historique plus ancien de la tradition orale ( Collina-Girard 2001 b )... La question reste ouverte !
La géologie constate en tout cas que si l'on recherche une île habitée , submergée 9000 ans avant notre ère devant les "colonnes d'Hercules", cette île existe bien ! C'est l'essentiel de l'argumentation de cet article qui pose le problème d'unbe concidence assez troublante pour reposer la question de l'origine du mythe platonicien ...
On voit que le niveau des eaux se stabilise vers 6000 ans avant notre époque actuelle, soit 4000 ans avant JC, selon notre mode de datation habituel. On note deux "accélérations", l'une vers 14.000 - 15.000 BP c'est à dire 12.000 - 13.000 avant JC et l'autre, plus récente vers 11.300 BP, c'est à dire aux alentours de 9300 avant JC. Elle se termine en 11.000 BP, c'est à dire 9000 ans avanr JC. Dans la première phase d'accelération la vitesse de remontée des eaux atteint 3,7 mètres par siècle et dans la seconde 2,5 mètres par siècle. En dehors de ces époques la remontée des eaux s'effectue au rythme de 0,5 à 0,9 mètre par siècle.
Courbe de remontéée de l'eau après la dernière glaciation. Elle doit être lue de droite à gauche.
BP signifie "Before Present".
La carte en noir et blanc publiée aux CRAS est plus parlante et plus documentée.
La partie blanche correspond au niveau minimal de l'océan il y a vingt et un mille ans. L'île faisait alors 15 km sur 4. Les zones qui étaient alors émergées sont couvertes par des hachures. Emerge alors ( 1 ) l'île du Cap Spartel. Au fil de la remontée des eaux celle-ci sera progressivement submergée, en 9000 avant JC ( 11.000 BP ) ce qui correspond au chiffre et à la localisation donnés par Platon. C'est ce qu'a donc découvert Collina-Girard. Actuellement la partie sommitale de l'île Spartel serait accessible sans difficulté à des plongeurs munis de scaphandres autonomes puisqu'elle culmine à - 56 mètres seulement. Ceci a été remarqué par différents sponsors potentiels qui ont proposé l'exploration des lieux. Collina, quant à lui, pense que le récit de Platon, recueilli initialement auprès de prêtres égyptiens a été dramatisé, embelli. En effet si on table sur une remontée des eaux liées à la fonte des glaces on obtient ( première figure ) une vitesse de 2,5 mètres par siècle. Pourtant Platon avait écrit que l'île avait été engloutie durant l'espace d'une nuit. Il manque, dans le texte de la publication des Comptes Rendus à l'Académie un passage que Collina a publié au bulletin de la société Vaudoise de Sciences Naturelles 88. 3 : 323 - 341. Le voici :
La tradition orale actuelle
La mémoire d'évènements anciens traverse les générations chez les peuples sans écriture : en Papouasie et en Nouvelle-Guinée les ethnologues ont relevé la précision de généalogies remontant parfois jusqu'à 14 générations ( Wessner et Al, 1998, p. 28 ). Dans le nord de l'île, le mythe du "temps d'obscurité" renvoie à une éruption volcanique précisément datée au début du XVII° siècle ( Blong 1982, Ballard, 1998 , p.23 ).
Les Anradoy ( Sud-ouest de Madagascar ) ont gardé, sur un millénaire, le souvenir de vertébrés disparus ( Aepironis et lémurens géants ) qui vivaient encore lors de la première occupation de Madagascar vers 1000 BP. C'est probablement cette occupation qui a accéléré la disparition totale de ces espèces dont le déclin était déjà effectif entre 2.300 et 2.000 années BP ( Mahé et Sourdat 1972 ).
Au Cameroun on a relevé des listes généalogiques qui s'étendent sur plus d'un millénaire ( Podlewski 1993 ).
Un océanographe, André Capart nous rapporte que lors d'une campagne limmonologique sur le lac Tanganyka un pêcheur indigène lui avait confié une légende locale. A une époque très ancienne il y aurait eu trois lacs à la place du lac actuel ... Les études géologiques et géophysiques confirmèrent par la suite que le lac Tanganyka, à une époque très ancienne, comportait bien trois cuvettes reliées par des détroits, aujourd'hui noyés. Le souvenir très précis de cette péléogéographie avait donc traversé sans faiblir plus de trois millénaires ! ( Capart 1986, p.10 ).
Au Canada les légendes des Indiens Gitksans renvoient à la fin du Pléiostocène et au début de l'Holocène. Les évènements rapportés ont pu en effet être corrélés avec des faits géologiques attestés : glissements de terrains, éruptions volcaniques, assèchement de lacs. Ces évènements ont été vérifiés et datés entre 6.000 ans BP et 10.000 ans BP ( 4000 à 8000 ans avant Jésus Christ ). Les Indiens renvoient couramment dans ces mythes à un temps avant ou après le déluge ( " Before the flood" ) ( Harris 1997 ). La déglaciation a été dans leur histoire une période charnière puisqu'elle a marqué le moment où le peuplement de leur territoire, enfin libre de glaces, a pu être possible.
Les traditions orales de l'antiquité
La Bible a enregistré des évènements d'il y a 7000 ans, dont on aurait trouvé récemment l'équivalent archéologique en Mer Noire ( Ryan et Al, 1997 , Ballard et Al, 2000, Fortey, 2000 ). Ces mythes du Déluge existent aussi chez les peuples sans écriture de Micronésie (Labeyrie 1985 ) : ils renvoient certainement aux évènements mondiaux et synchrones identifiés par la géologie et qui font basculer le monde glaciaire vers le monde actuel avec des limites de continents complètement transformées.
Jacques Cauvin, spécialiste de la néolithisation au Moyen-Orient retrouve dans le livre de la Genèse les principaux évènements objectifs du passage de l'économie de cueillette à l'économie de subsistance ( agriculture et élevage ). Pour cet auteur ils est "difficile de de ne pas envisager que c'est d'elle ( la Révolution Néolithique ) qu'il puisse s'agir. Si c'est bien le cas il s'agirait d'une transmission orale de plus de 6000 ans dans des textes compilés 900 ans avant Jésus-Christ, pour la Bible" ( Cauvin, 1994 ).
La préhistoire
La préhistoire des chasseurs-cueilleurs contronte avec des conservatismes qui impliquent la transmission de tradictions quasi immuables pendant des millénaires. L'art préhistorique européen en est un excellent exemple puisque transmis ( avec la vision du monde qu'il impliquait ) sans changements majeurs pendant 20.000 ans. Dans la grotte du Parpallo, près de Valence, Jean Clottes a relevé la permanence de rites identiques ( offrandes de plaquettes gravées ou peintes ) pendant 10.000 ans ( 4500 plaquettes dans les couches allant du Gravettien au Magdalénien final inclus ). Comme le constate ce spécialiste de l'art pariétal : "ces comportements témoignent de façon indiscutable de la persistance de la même tradition religieuse sur dix millénaires" ( Clottes, communication verbale et interview, Herbaux, 2002 ).
Si l'ethnographie et la préhistoire nous montrent l'efficacité d ela tradition orale chez les peuples sans écritures et l'aptitude à transmettre sur des millénaires le souvenir d'éléments naturels catastrophiques pourquoi refuserions-nous cette possibilité aux peuples antiques ? Pourquoi une tradition de ce type n'aurai-elle pas pu parvenir aux premiers scribes égyptiens pour être ensuite transmise à Platon ?
La fin de la glaciation : un traumatisme culturel majeur dans l'histoire de l'humanité ?
Dans le détroit de Gibraltar, l'histoire géologique de l'île du Cap Spartel et de son archipel s'ajuste à la tradition rapportée 9000 ans après Platon dans le "Timée" : lieu, date de submersion et géographie coincident. La transcription par des scribes égyptiens, après 5000 ans de transmission orale, a pu être possible dès 4.236 BC ( avant Jésus-Christ ). cette date est celle du premier calendrier basé sur le lever héliaque de Sirius (astronomiquement daté) et celle du début de l'écriture hiéroglyphique ( Lefort 1998 ).
Le "mythe" de l'Atlantide pourrait renvoyer, au moins en partie, et contradictoirement à l'avis de l'opinion actuellement dominante ( Vidal-Naquet 2000 ) à des traditions orales, seuls témoins vers 9000 avant Jésus-Christ de l'écroulement d'un monde en pleine apogée : celui des chasseurs de la fin du paléolithique et de leur univers glaciaire. Il est vrai que la seule certitude est que l'histoire géologique réelle du Détroit raconte une "histoire vraie" proche de celle rapportée par Platon. S'agit-il d'une pure coincidence ( Thivel 2001 ) ou touchons nous ici à l'origine du mythe qui aurait hérité du savoir historique plus ancien de la tradition orale ( Collina-Girard 2001 b )... La question reste ouverte !
La géologie constate en tout cas que si l'on recherche une île habitée , submergée 9000 ans avant notre ère devant les "colonnes d'Hercules", cette île existe bien ! C'est l'essentiel de l'argumentation de cet article qui pose le problème d'unbe concidence assez troublante pour reposer la question de l'origine du mythe platonicien ...