L’hallucinante absence de l’amazighité dans les médias....

Souss

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À notre époque, l’image est un trait majeur de la civilisation actuelle. Ses pouvoirs sont immenses et ses messages sont tout autant infinis. Exister équivaut presque à se mettre en image ou à l’image. Dans le paraître, il y a l’être comme disait je ne sais plus quel philosophe. Bref, l’image est d’une importance capitale. Ce qui est encore plus vraie avec l’image de la télévision qui confère à ceux qui la possèdent beaucoup de puissance.

L’hallucinante absence de l’amazighité dans les médias marocains
 
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Améliorer la présence de la langue et de la culture amazighes dans les médias publics est une des préoccupations du gouvernement actuel. Des commissions se penchent sur les meilleures mesures susceptibles de fournir à cette composante de notre culture une visibilité « normale » au sein du paysage médiatique national. C’est la conséquence d’une convergence historique entre un mouvement de revendication culturelle authentique, émanation de la société civile amazighe et la volonté royale de réhabiliter un pan entier de la mémoire collective marocaine. Illustration de cette volonté du Souverain, la création de l’IRCAM, comprendre l’Institut Royal pour la culture amazighe dont il a confié la direction à une éminence grise de cette culture, le professeur Boukouss, un des pionniers de cette action de réhabilitation dont les écrits font partie des initiatives qui ont ouvert la voix au processus dont nous commençons à saisir les prémices. L’IRCAM est dans cette perspective un incitateur, une force de proposition. Son dernier conseil d’administration vient d’émettre des résolutions allant dans ce sens (augmentation du volume horaire consacrée à l’expression amazighe, création d’un Grand prix national récompensant les meilleures œuvres dans la langue de Yugurtha.
Cela fait partie d’un vaste chantier qui est par ailleurs traversé de grandes interrogations d’ordre stratégique notamment celles concernant le volet audiovisuel, la télévision en particulier. Interrogation du genre : faut-il développer ce qui se fait sur les deux chaînes publiques (trois voire quatre si l’on comptabilise la quatrième et la chaîne satellitaire) en multipliant le nombre d’émissions et de productions amazighes ? Ou faut-il carrément aller dans le sens d’une chaîne, ou deux, dédiées à la langue originelle du pays ? Il y a plusieurs variantes de réponses. Ou d’approches. L’approche volontariste qui veut brûler les étapes pour rattraper le temps perdu et préconise de mettre les bouchées doubles pour réparer une injustice historique. Il y a l’approche pragmatique qui tient compte des équilibres, des sensibilités et des résistances en proposant plutôt d’améliorer graduellement ce qui existe déjà tout en travaillant à son élargissement. Et il y a une troisième variante pour aborder le sujet, appelons là faute de mieux systémique, qui part du principe que nous sommes en train de vivre un tournant et que ce choix politique dicté par la plus haute autorité du pays, légitimé par l’histoire et la culture est de nature paradigmatique c’est-à-dire qu’il ouvre la voie à une nouvelle façon de voir la réalité du pays. Réhabiliter la culture amazighe dans cette approche ne se réduit pas à une série de mesures techniques ou à la mise en place d’une sorte de quotta pour déculpabiliser les consciences malheureuses et permettant de se présenter devant les électeurs avec des statistiques ridicules sur l’augmentation de l’enveloppe horaire consacrée à la chanson, à la fiction, aux information en langue amazighe. Cette façon de faire est erronée et frise l’apartheid. La langue amazighe n’a pas besoin de strapontin, elle doit être présente d’abord en amont de toute réflexion sur des projets de production et de création. Avant d’apparaître en termes de créneau d’antenne de diffusion, elle est présente dans la conception de toute la grille de programmation. En d’autres termes et pour donner des exemples concrets la présence d’un j.t en langue amazighe ne libère pas le j.t principal (en arabe ou en français), de l’une ou l’autre chaîne, du devoir de prendre compte, désormais, qu’il s’adresse à une société plurilingue et du coup la ligne éditoriale s’en trouverait remaniée aussi bien dans la vision, les mots utilisés (continuer à user du vocable « berbère » est une insulte), ou de l’angle privilégié. Bref, l’amazighité en tant que choix culturel avant d’être des idiolectes doit traverser en filigrane l’ensemble du paysage médiatique.
Deux autres exemples éloquents. La soirée de samedi, sur les deux chaînes fait de temps en temps des ouvertures sur la variété amazighe. Un effort louAutres chroniques :
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able mais bien limité non en termes de chronomètre mais en terme de logique de conception. Une première distinction montre que 2M privilégie un traitement à la patchwork : un chouia de chaabi, un imik de tachelhit et le tour est joué. Pour être plus sympa, Imad Ntifi demande à Tihihit de s’adresser à son public en amazigh : naïvement et sans s’en rendre compte, il commet une maladresse de taille qui a gêné son invitée, la grande star de la chanson tachelhit. Pour parler une langue il faut être dans une situation d’échange, l’amazigh ne se parle pas dans l’air.
Le samedi d’après sur la première chaîne, autre traitement mais la même logique éclectique: cette fois toute la soirée est dédiée à la chanson amazighe dans ses variantes locales de Rouicha à Tihihit. Mais la logique d’ensemble notamment au niveau de la mise en scène trahit une manière de filmer superficielle, coupée de l’énoncé, se concentrant sur le simple jeu du montage qui tourne à vide. Aucune approche appropriée à la spécificité du sujet. On filme Tihihite comme on filme une partie de Tennis il y a 40 ans : la caméra virevolte sans parti pris esthétique. Filmer la chanson amazighe suppose une logique de temps appropriée ; un rapport au corps et à l’espace spécifique. Bref, il faut un regard ou ce que nous avons appelé une nouvelle ligne éditoriale dans le rapport à l’amazighité.

Mohammed Bakrim
 
C'estbien le discours type d'une amazigh de service. D'autant plus que l'auteur est le bras droit du directeur du très officiel et censeur, CCM, Centre cinématographique marocain. Le CCM, soit dit en passant, est lui délivre les visa pour le passage des films dans les deux télés. Le CCM, dont Mohammed Bakrim est l'adjoint du directeur, aloue annuellement une substancielle aide à la production cinématographique marocaine. Oeuvre dans laquelle ne figure curieusement pas le ciénma amazigh.
 
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