Le mouvement berbere ou amazigh au Maroc "1912-1997"

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Le mouvement berbère au Maroc : à la recherche de la construction d’une Identité éthnique "1912-1997"
Publié le : samedi 11 octobre 2003.

Gabie Kratochwil vient de publier sa thése, soutenue en 2002 à l’université de Bonn. Cette vaste synthèse, très documentée et argumentée constitue le premier travail exhaustif sur la construction de l’identité berbère et l’histoire du mouvement culturel amazigh au Maroc. Ce sujet très spécifique est constamment situé et évalué au sein de l’ensemble politique et culturel marocain.

Après une définition du thème et des contours méthodologiques, G.K. retrace dans sa deuxième partie, 1912-1956, les différentes phases, au Maroc, de la pacification des tribus berbères et de la politique menée durant la période du Protectorat français : "la politique berbère de la France", les principales révoltes berbères entre 1907 et 1926 (avec une présentation de quelques chants de résistance des tribus du Moyen Atlas), avant d’examiner comment se situent les Berbères durant la période du nationalisme marocain.

La troisième partie, 1956-1979 s’attache essentiellement au rôle et au discours des Berbères à partir de l’indépendance en retraçant les débuts de la question berbère et le rôle des premières associations amazighes, l’Amrec et l’Ancap. La quatrième partie, 1980-1997 est consacrée aux fluctuation du MCA entre le culturel et le politique, l’opposition et la répression de l’État, la création de l’université d’Agadir tandis que l’on assiste au début des manifestations berbères, à la production des premiers textes officiels du mouvement et à une intensification des conflits entre arabité et berbérité.

Après avoir montré les espoirs suscités par le discours du roi en 1994, à la suite de "l’affaire Tilelli", G.K. analyse très finement, grâce à un important travail de terrain, le boom associatif berbère qui s’ensuivit dans les trois régions berbérophones et les divers aspects du discours berbériste, de la tendance culturaliste modérée à la tendance culturaliste politique, en passant par le militantisme dans le cadre juridique des Droits de l’Homme.

Les éléments biographiques que l’on trouvera en fin de volume sur les principaux acteurs du MCA sont un apport très estimable. G.K. se penche enfin sur la création du Congrès mondial amazigh (organisation et objectifs) annonçant la naissance d’un mouvement berbère transnational . Elle dépassera l’année 1997 en évoquant dans sa présentation la création de l’Institut royal de la culture amazighe (Ircam), jalon essentiel pour l’avenir de la question amazighe. La question linguistique est d’ailleurs étudiée tout au long de ce travail qu’un appareil de note très conséquent rend particulièrement précis et documenté : situation universitaire, nouvelle chanson, passage à l’écrit, choix des caractères, enseignement, tous ces thèmes qui prennent aujourd’hui un relief particulier depuis le choix, approuvé par le roi, des caractères tifinaghs par les membres de l’Ircam.

Ce travail, très riche (la bibliographie en témoigne) et novateur, répond à une véritable demande de la part des chercheurs, des étudiants et du milieu associatifs au Maghreb et dans la diaspora berbère. Il gagnerait beaucoup à être traduit en français pour une meilleure audience et diffusion, la publication en langue allemande (comprenant fort heureusement de nombreuses citations en français), limitant considérablement son impact.

Claude Brenier-Estrine pour Le Matin
 
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