LES IDENTITÉS AMAZIGHE ET ARABO-ISLAMIQUE AU MAROC.

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LES IDENTITÉS AMAZIGHE ET ARABO-ISLAMIQUE AU MAROC. Diversité culturelle et linguistique dans un champs politico-religieux uniforme.



Ron Haleber, Amsterdam.



Une langue n'est pas un porteur arbitraire de significations, elle incarne une culture, cela veut dire qu'au Maroc, elle est porteur d'un contexte religieux et de conscience politique nationale.
L'identité ethnique et linguistique au Maroc est inséparable de son histoire politique et religieuse.

Comme exemple, je réfère à Lahcen Amargui [dans: Le Maroc et la Hollande, Rabat, 1995] qui a contrôlé la thèse de Rancourt et de Grandguillaume sur l'utilisation de l'expression du «je» au maghreb.
Dans des essais faits par des élèves en français, et en arabe, Amargui a trouvé en français, huit exemples du «je», tandis qu'en arabe qu'un seul exemple.

Amargui explique la différence par le fait qu'en arabe, les élèves «donnent l'avis du Coran, du Hadith, de poètes arabes, mais très rarement leur propre opinion» (o.c. 67). Grandguillaume dit «la langue arabe est une sorte de miroir dans lequel se reconnait l'élève marocain. Il y voit les lois islamiques, les interdits, les promesses et les châtiments».



Selon Abdallah Bounfour, dans son "Le noeud de la langue", [langue, littérature et société au Maghreb, Edisud, 1994] l'islamisation opérait dans l'histoire du Maroc, sur le champ culturel et quotidien, de fait, une arabisation unitaire, même si dans beaucoup des régions marocaines la langue amazighe apparait comme le moyen d'expression:

«L'arabisme et l'Islam ont été les moyens idéologiques de mobilisation contre le colonialisme. Ils sont encore dominants et constituent le credo des partis dits «traditionalistes» ou «salafistes» (...) Au nom de l'unité, la diversité est sacrifiée, refoulée, étranglée (...) Toute problématique culturelle qui ne remet pas en question la notion d'unité est une problématique ethnocentrique et, par conséquent, oppressive».

Également, le champ d'historiographie et de politique nationaliste, inclus les différentes formes de socialisme, se trouve dominé par une culture unitaire, d'origine arabo-musulmane.

Le nationalisme citadin, dit l'Istiqlal, a monopolisé le champ politico-religieux depuis son origine pendant les années trente. Le nationalisme extra-citadin par ex. d'Abdelkrim Khattabi était dans l'historiographie officielle (par ex. chez Abdallah Laroui) souvent exclu, identifié avec la notion de `siba', `régions périphériques en révolte contre le makhzen'. Alors, l'inspiration arabo-islamique dominante du salafisme et de son héritier, [color=0000FF]l'islamisme - idéologie contestataire de référence pour la majorité de la jeunesse marocaine d'aujourd'hui - [/color] pose un problème pour une intégration de la langue et de la culture amazighe (cf. al-Fasi, Jabri, Yassine).



Je veux traiter ici quelques questions qui surgissent de cette situation marocaine, et qui sont les suivantes:

1. Est-ce que la renaissance de la culture et de la langue amazighe, contribuera-t-elle à la création d'une identité démocratique et nationale du Maroc? Ou restera-t-elle, manque d'existence d'un espace de diversité, manque d'une société civile, finalement un facteur isolé de division ethnique?

2. L'idéologie social-démocrate et marxiste en Afrique du Nord parait depuis le «socialisme arabe» de Nasser et le «Baath» étroitement lié au nationalisme arabe. Au Maghreb, le nationalisme a la tendance de se lier avec l'islam, sous la forme de la «salafiya». Un phénomène récent de cet amalgame, où le marxisme semble se rallier à l'islamisme, est le «manifeste de Beyrouth».

Est-ce que ces discours issus de la création de l'Etat Nation menacent l'expression d'un discours d'ethnicité comme celui de la langue et de la culture amazighe?

3. Quelle est la relation entre culture amazighe et islam?


Comme illustration de mes réflexions, j'utilise des parties d'une série d'interviews que j'ai publiées sur la langue et culture amazighe en néerlandais dans la revue Soera (1995, no. 1-3), après l'ouverture créée par le discours royal du vingt août. Mes interlocuteurs sont deux protagonistes du Mouvement Amazigh au Maroc, maître Hassan Id Balkacem et son collègue Ahmed Adghirni:

Hassan Id Balkacem (44), né à Agadir, est avocat, poète, président de l'association berbère de la culture et de l'art populaire, membre de l'Association Marocaine des Droits de l'Homme (AMDH), et membre de l'union marocaine des écrivains.

Ahmed Adghirni est avocat, auteur, entre autres d'une étude sur le Mouvement Populaire d'Aherdan.



[color=0000FF] 1. IDENTITÉ ETHNIQUE & SEPARATISME: [/color]



[color=0000FF]Haleber:[/color] Il se pose le problème du pluralisme de l'identité marocaine. Pourtant, beaucoup de mes amis marocains avec qui j'aborde ce problème, ici au Maroc, comme aux Pays-Bas, ne regardent le Mouvement Berbère que comme un danger séparatiste qui divisera le peuple marocain, et qui menace l'unité fragile de l'état marocain. Quelle est votre réponse à ces accusations?

[color=0000FF] Balkacem:[/color] «D'abord, il faut dire que historiquement les Berbères ont toujours été les unificateurs du peuple marocain. Le rôle des dynasties berbères des Almoravides, des Almohades a été toujours l'unification du pays.

Deuxièmement, ce qui unifie les gens, c'est le respect de l'autre et la reconnaissance des droits de l'autre. Ce n'est pas le contraire! Et c'est cela justement que demande le mouvement berbère aujourd'hui.

Prenons l'identité marocaine: tous ceux qui disent que ce mouvement exprime une inclination envers le séparatisme, eux, disent que l'identité marocaine est une identité arabo-islamique. Le seul mouvement qui dit que l'identité marocaine est une identité multidimensionnelle, c'est le mouvement culturel berbère.

Il n'y a aucun mouvement au Maroc qui reconnait l'identité marocaine dans sa multidimensionnalité, ni la constitution, ni les programmes des partis politiques. Même au sein des associations des droits de l'homme, on trouve parfois des problèmes à exprimer son identité berbère. L'importance de l'unification du Maroc est clair, mais pour unifier, il faut accepter l'existence de la diversité».



[color=0000FF] Maître Adghirni [/color] y ajoute: «On ne peut pas parler du séparatisme au Maroc. Ce problème se pose dans des autres pays, où des régions exigent leur droit spécifique, par ex. en Belgique, entre Flamands et Wallons. Mais au Maroc, il n'existe pas une région arabe. Tout le monde reconnait que le Maroc est d'origine un pays berbère, et aussi dans son histoire le pays entier est resté berbère».



[color=0000FF] Haleber:[/color] Alors, n'y avait-il pas une cohabitation des Arabes avec les Berbères?

[color=0000FF] Adghirni:[/color] «Non, le pays est un ensemble qu'on ne peut pas diviser en régions arabes ou berbères. Bien sûr, il y avaient des régions différentes, mais le nationalisme marocain s'est basé sur le prétexte d'une unité nationale, sans que ce nationalisme n'ait pu expliquer ce qui a pu unifier les Marocains.

La langue n'était pas unificateur, parce que pendant toute leur histoire, les Marocains ont parlé de multiples langues: le phénicien, le latin, l'arabe, l'hébreu, le français, l'espagnol, et à coté le berbère. Pourtant, le Maroc est resté toujours unifié».



2. L'ARABISME NATIONALISTE ET ISLAMISTE.


Personnellement, j'ai l'impression qu'au Maroc on sous-estime ,pour des raisons diverses, les effets des divergences linguistiques. Je veux vous en donner un exemple:

Le philosophe Mohammed Abed Jabri, lui-même d'origine amazighe, visitait en 1993 Amsterdam. Je lui demandai pourquoi il aspirait à tuer, exterminer la langue amazighe.
Il me répondit en arabe: «Mon point de vue concerne la position de la langue dans l'enseignement. Si les Marocains passent à l'école, ils ne parlent que le berbère ou le dialectal marocain. Si on veut former des jeunes et des étudiants qui sont à la hauteur des problèmes de notre temps, de la modernité, nous devons procéder à faire mourir (imata) ces dialectes. [color=0000FF] Il ne s'agit pas d'abattre, mais d'ôter les sources de vie de ces dialectes[/color], pour accroître de cette manière une langue arabe commune et classique, le fousha, au bénéfice d'un développement culturel positif».

Ma question causa une indignation parmi les organisateurs de la rencontre, entre autres parce qu'aux Pays-Bas on est en train de se ré-orienter sur les matières enseignées aux enfants marocains dans les écoles primaires en langue arabe.

Récemment le défunt Cadi Kaddour était invité pour conseiller les responsables de cette matière, sur cette problématique, ce qui remet bien sûr, l'emploi des enseignants de langue arabe en question.


Ensuite, j'ai demandé à mon interlocuteur Adghirni: comment expliquez-vous des réactions comme celle de Mohammed Jabri? Il me répondit en se référant au lien entre la langue arabe et le pétrodollar:

[color=0000FF] «Il ne faut pas oublier que l'impact du nationalisme arabe, que Jabri représente,est basé sur la force des prix de pétrole. Au Maroc beaucoup des gens ont des relations implicites avec les pétrodollars...[/color]

[color=0000FF]
Les pays arabes pétroliers comme la Libye ou ceux des Baathistes ont donné l'occasion à ces intellectuels, ces nationalistes arabes d'obtenir une place importante dans notre société. Jabri a fait ses études en Syrie avec une bourse du Baath, et après il est revenu à l'université Mohammed V pendant la période de Lahbabi. D'après ma connaissance, il a été formé pour remplacer avec son nationalisme arabe l'influence humaniste de Lahbabi à la faculté de lettres.
Également, l'influence importante de l'Arabie Saoudite compte beaucoup, au début c'était le centre culturel arabe qui a publié les livres de Jabri...»[/color]


J'ai continué: Actuellement on observe que, - malgré Saddam Hussein et sa popularité au Maghreb pendant la Guerre du Golfe, ces idéologies du nationalisme arabe et leur idéal de l'unité arabe, apparaissent de plus en plus comme des phénomènes du passé. C'est déjà le cas depuis la défaite de Gamal Abdel Nasser de 1967... Pourtant, les nouveaux mouvements de renaissance ethnique, partout dans le monde, ne représentent-ils pas une inclination conservatrice et réactionnaire, qui comme celui des Serbes, nous rappellent même aux idéologies allemandes d'ethnocentrisme raciste...? Pourtant, vous deux, vous avez été actifs dans des mouvements gauchistes, alors comment combinez-vous ces deux tendances?

[color=0000FF] Adghirni:[/color] «Moi et Hassan, nous avons discuté beaucoup avec nos copains nationalistes arabes, ces socialistes marocains. Mais nous avons découvert que dans l'histoire moderne, le nationalisme et socialisme arabe ont toujours été liés aux régimes militaires. Même aujourd'hui, ces socialismes sont encore toujours dirigés par des colonels et d'autres militaires, par leurs partis uniques, voyez Iraq, Syrie, Algérie.

Dans notre pays, on a appris à se méfier de ce genre de nationalisme. Et leurs données idéologiques comme l'unité arabe, en vérité, n'ont jamais été des réalités.[color=0000FF] Ces derniers temps, nous avons découvert aussi qu'avec l'arabisation, il s'agit d'une intervention politique, plus que d'autre chose...[/color]

Aussi, est-il gênant pour nous de se considérer comme Arabes, tandis que nos ancêtres et notre propre famille sont des Berbères. Même si j'ai appris dans mon douar, pendant ma jeunesse, le Coran en arabe, je n'ai jamais cru que je suis Arabe. Mes parents font leur prière et citent le Coran en arabe, mais ne se considèrent pas comme Arabes».


J'ai continué la discussion par poser la question suivante: Pourtant, dans les expressions des courants l'islamistes actuels, comme en Algérie, -comme l'héritage du salafiya maghrébin, on interdit beaucoup de pratiques, comme la vénération des saints, ce qui est une caractéristique importante de l'islam dit populaire, l'islam berbère. Depuis huit siècles au moins, depuis Ibn Tamiyya, il existe ce mouvement puriste d'exclusion.

[color=0000FF] Adghirni:[/color] «Je crois pourtant que l'islam chez nous est différent de celui de l'Orient. Par ex. des shi`ites avec leur clergé fermée. Nous avons avec notre soufisme et zawiyas des traditions différentes. Le point crucial, c'est qu'il ne faut pas confondre culture et religion, alors le nationalisme arabe avec l'islam.

Dernièrement cette semaine, je viens de lire dans un journal une déclaration par un parti marocain, la gauche démocratique, l'OADP, élaboré à Beyrouth en Liban, pendant une rencontre à laquelle ont participé des associations islamistes.

[color=0000FF] Ces représentants de l'islamisme marocain et du panarabisme marocain déclarent ensemble qu'il faut toujours lier l'islam et l'arabisme. Voyez donc les vraies intentions des nationalistes arabes!»[/color]

Maître [color=0000FF] Balkacem y ajoute:[/color] «Alors, le «manifeste de Beyrouth» a été signé par des nationalistes arabes et des islamistes. Cela veut dire que les nationalistes arabes qui étaient auparavant gauchistes, deviennent des alliés des islamistes. Donc, au Maroc dans le proche avenir, on trouvera ces nationalistes arabes qui optent pour cette coopération avec les islamistes contre le mouvement démocratique, dont le mouvement berbère est un noyau essentiel».


Ce dernier point nous montre, selon moi, un phénomène récent du syncrétisme de l'idéologie de l'arabisme. Il est important de constater comment dans ce cas les conceptions de la langue arabe et de deux différentes soi-disantes «ethnicités» se confondent. Il y a une fusion - je laisse ouvert, s'il s'agit d'un court-circuit, de confusion ou d'un raisonnement justifié - de la langue marxiste et islamiste.

Il s'agit du soi-disant «Manifeste de Beyrouth» du 12 octobre 1994, un document très important, que, à ma connaissance, la presse occidentale n'a pas remarqué. Dans ce Manifeste, des représentants de tendance gauchiste-marxiste, se réconciliaient avec des représentants de tendance islamiste, par ex. du Hamas palestinien.

Les représentants «se considèrent comme deux courants de l'authenticité, de la fermeté et de la résistance à l'intérieur de l'oumma. Ces deux mouvements, celui de l'arabisme et celui de l'islam, se ressemblent, tant dans leurs points de départ intellectuelles, que leur disposition pour sauver l'oumma, aujourd'hui comme dans l'avenir, ainsi qu'il a été le cas toujours depuis leur existence».

[color=0000FF]
L'ambiguïté linguistique et sémantique du Manifeste continue: ils exigent «une continuation de la lutte et du jihâd pour réaliser le but de l'unité arabe», et aussi «une réconciliation dans le cadre de la grande patrie arabe».[/color]
On exige «une reconnaissance de la shoura, mais avec comme principes politiques le pluralisme et la démocratie». «La nahda arabe ne peut se réaliser uniquement qu'ensemble avec la renaissance du monde islamique», pour lesquelles il faut que les classes arabes et islamiques luttent ensemble.

[color=0000FF] Il est important de constater que dans cette dite «déclaration historique», la lutte des classes et le jihâd coïncident. Également la patrie arabe et l'oumma islamique ne s'excluent plus mais se renforcent.[/color]

[color=0000FF]
Il est intéressant que les deux identités internationalistes, les marxistes et les islamistes se retrouvent dans ce manifeste sur un certain «arabisme», ce qu'il faut interpréter dans ce cas, selon moi, dans l'intermédiaire de la langue arabe. Pour les islamistes, c'est la langue sacrée, et pour les marxistes modernisés, c'est le véhicule de la révolution d'indépendance et nationale de la Nation Arabe. Les islamistes cèdent au fait que la langue sacrée en soi joue le rôle d'unificateur, et les marxistes cèdent au fait que leur Nation soit identique à l'oumma du Coran en langue arabe. Il n'y a pas d'autre explication possible, parce que pour les islamistes, il est inimaginable que l'arabisme réfère au nationalisme arabe de Nasser, le bourreau de Qotb, et il faut donc que de leur part, les marxistes baissent le ton et abandonnent les prétentions du watan arabiya et ne se réfèrent qu'à la langue arabe comme intermédiaire idéologique.[/color]


Qu'est ce qu'il se passe donc ici...? [color=0000FF] La langue arabe[/color], tout en restant, de fait, véhicule de l'ethnie arabe, de ses expressions d'ethnicité arabe, [color=0000FF] réconcilie donc en sa qualité de langue sacrée, deux idéologies opposées, deux idéologies qui s'excluent parfaitement: le marxisme laïque et l'islamisme théocratique.[/color] Il faut constater, que ce phénomène unique, ce tour de force du thème de notre colloque «langue et ethnicité» [color=0000FF] n'est possible que sur des territoires arabophones, et nulle part ailleurs sur notre planète...[/color]



3. IDENTITÉ AMAZIGHE & MUSULMANE:



Puis, j'ai voulu m'éloigner du domaine du politique et aborder le problème du lien entre la langue arabe et l'identité musulmane: La plupart des musulmans n'est pas arabophone, pourtant l'orientation envers la langue arabe semble centrale pour les musulmans. L'islam, ne pousse-t-il pas les gens vers une promotion de la langue arabe?

[color=0000FF] Adghirni:[/color]
«Les deux peuvent très bien se combiner. Pendant mon enfance, je faisais mes prières en arabe, en parlant dans la vie quotidienne berbère. Même dans les mosquées, on utilise aussi des prières en berbères. Même les cinq prières quotidiennes. On traduit les hadith en berbère. Les imams à la campagne ne parlent pas arabe, ils ne citent que le Coran en arabe, appris par coeur, parce qu'il est sacré, bien souvent sans en comprendre le contenu».

[color=0000FF] Haleber:[/color] Mais est-ce que dans un pays islamique et arabisé, n'a-t-on pas tendance à regarder la culture berbère comme pré-islamique, comme jahiliya, alors n'êtes-vous pas considéré comme des païens...? Adghirni me répond en faisant une distinction intéressante entre la culture du Maghreb et du Proche Orient:

[color=0000FF]
«Non, chez nous au Maroc, on n'a jamais connu cette période de jahiliya, parce que la jahiliya fait partie et est lié à l'histoire spécifique de la Péninsule Arabe. [/color]


La preuve aussi, c'est que certains usages des Arabes de la jahiliya qui sont répressifs et discriminatoires pour les femmes n'ont jamais existé chez nous, les Berbères, qu'on dit matriarcales.

Au contraire, dans l'époque du prophète Mohammed, dans l'Afrique du Nord, il y avait le règne de la reine Kahina. Et quand les Arabes sont venus chez nous, ils se sont trouvés opposés à des reines et des princesses qui ont fait la guerre contre eux. Donc,[color=0000FF] nous sommes en coutumes profondément différents de cet Orient arabe».[/color]

[color=0000FF] Haleber:[/color] Est-ce que vos explications considèrent-elles la culture berbère comme un contexte original pour l'islam? Par ex. en Indonésie, le pays musulman le plus grand, un ministre d'Affaires religieuses, accentue l'importance de contextualiser les données de l'islam. L'encadrement de l'islam dans le contexte hindou javanais, le symbiose culturelle et artistique des coutumes locales, héritée par ex. de la cour sultanale de Yogyakarta, garantie une tolérance, et évite le fanatisme qui se répand aujourd'hui un peu partout.

[color=0000FF] Adghirni:[/color] «Mais c'est exactement ce que nos ancêtres ont fait dans leurs mosquées. Depuis quatorze siècles, ils ont pratiqué le `orf amazighe, et on le pratique encore toujours à côté de l'islam. Les savants de l'islam dans leurs fatwa's n'ont jamais interdit notre langue, ni nos coutumes culturelles».



-- Je veux conclure en posant brièvement quelques thèses qui restent ouvertes pour une discussion sur le thème «langue et etnicité»:



1. [color=0000FF] Une langue, c'est un véhicule - souvent en forme cachée -d'une certaine culture et d'une certaine politique.[/color] Sur le champs linguistique marocain se confrontent trois groupes de langues, porteurs de cultures et politiques différentes: l'arabe classique et dialectal, trois variantes de l'amazigh, et les langues étrangères, notamment le français.



2. Au Maroc, il existent donc trois cultures et politiques différentes, qui sont propagés de fait (et pas en principe) par ces trois groupes de langues. Elles sont:

1. La tradition de l'islam et de la culture arabe classique, défendue par le nationalisme marocain et son historiographie officielle.

2. La culture populaire amazighe, en trois formes soi-disant régionales.

3. Des langues des publications des sciences modernes et d'information internationale.



3. [color=0000FF]Au Maroc une politique de bilinguisme ou plurilinguisme de langues ne peut contribuer à renforcer la démocratie qu'à condition que toutes les libertés et moyens d'expression de la société civile soient effectués. Autrement le danger de division `ethnique' reste présent.[/color]



4. Également - sans que les chercheurs linguistes en soient conscients - [color=0000FF] l'utilisation et le choix éducatif des langues dans l'émigration a des graves conséquences culturelles et politiques.[/color] Une réflexion sur ces conséquences de l'introduction d'un bilinguisme dans les pays d'immigration, par ex. sur les effets sur l'assimilation, l'intégration, l'identité propre des migrants est nécessaire.



rédaction et copyright: Ron Haleber



[ Edité par agerzam le 17/8/2004 8:36 ]
 
Aujourd’hui, la question que je me pose, c'est comment le Maroc peut-il aspirer à un passage à une démocratie, tout en reniant son peuple? Son histoire? Son identité?
Aujourd’hui, on doit s'inscrire dans une identité multiple, dont la condition sine qua none, serait la présence de l'amazighe et en première place SVP!!
Pour répondre à la question de ton texte ( enfin celui que tu as proposé): Les Amazigh ont toujours uni le pays, pourquoi est ce qu’aujourd’hui ils seraient un facteur de séparation basé sur l'ethnie!!
Par contre l'arabe, en refusnat de reconnaître jusqu'à l'existence même de l'Amazigh, et ce pour des raisons idéologiques et non cognitives, prêche d'office le séparatisme!!
 
La culture arabo islamiste est anti democratique (par essance elle est dictatoriale avec un système politique ancestral le Califat) donc tant que le maroc aura une politque arabe et islamique pas de democratie mais une DEMO-CRASSIE.

Le lien avec la religion et le monde arabe doit etre coupé NET.

Ainsi nous pourrons esperer un avnir meilleur.
 
Cher soussi,tu vas trop loin en demandant une coupure nette avec l'Islam, une religion que nos aïeux ont embrassé il y a quatorze siècles et qui fait partie essentielle de notre identité culturelle. Dans un pays multi ethnique et pluri culturel comme le nôtre,ce qu'il faut, c'est donner à chaque culture la place qui lui revient de droit en faisant, par exemple, de la langue amazigh une langue nationale; sans aller jusqu'à renier ou vouloir effacer d'un trait plus d'un millénaire d'histoire et de culture commune.C'est utopique,illogique et irréalisable.
 
Oursingh isdoufigh kra wawal ighd kra yadnine,mais j'ai simplement dit ce qe je pense sincèrement et objectivement.L'essentiel est qu'un dialogue soit instructif pour tous les intelocuteurs et que de la discussion jaillisse la lumière comme on dit.
 
Je vais etre plus clair :
La religion ne doi pas etre d'etat et ttes les autrres croyances doivent etre au meme niveau.
La religion n'a rien a faire dans le monde politique.

Pour resumer tt est dit dans ma signature
 
Là, je suis d'accord.La liberté de pratiquer une religion ou non doit être laissée à l'individu.Quantà la laïcité de l'Etat, c'est pas demain la veille,il y a trop d'enjeux,beaucoup de pressions internes et externes et c'est un pas qu'il n'est pas aisé de franchir.Tu es libre d'avoir ton opinion qui se doit d'être respectée; celles des autres, aussi.
 
Le Maroc profite trop de la religion, elle est citée dans la constitution, et rappelons au passage que M6 est commandeurs des croyants!!
Alors y a tellement d'enjeux!!
Je suis d’accord avec le principe, ça viendra un jour, mais pas demain !!
 
on c plus skon doit dire si c le Maroc ki profite de la religion ou si c M6 qui profite au Maroc avec tt le respect kon doit a chak individu bien sur!je trouve que le laxisme est de venu tel au Maroc que c abérant!

et ceux méme au nivo religieux avec tt c nouveaux droits .... en voulant faire avancé les droits tt ce kil en a été c la confusion totale pour ma part g l'impression que c le monde a l'envers un pays se disant Musulman trop à l'occidentale... :-?
 
On ne met en cause les choses mais ce qu'on en faire une fois recupérées bpar de mauvaises mains!! la religion fait partie de ces "choses"!!
 
L'Islam et l'arabisation de la Berbérie
Comment l'Afrique du Nord, peuplée de Berbères en partie romanisés en partie christianisés, est-elle devenue en quelques siècles un ensemble de pays entièrement musulmans et très largement arabisés, au point que la majeure partie de la population se dit et se croit d'origine arabe ?
Plutôt que de rechercher les causes d'un relatif échec de la romanisation il me parait plus positif de montrer le mécanisme de l'arabisation.

L'ISLAMISATION N'EST PAS L'ARABISATION

Il importe, en premier lieu, de distinguer l'Islam de l'arabisme. Certes, ces deux concepts, l'un religieux, l'autre ethnosociologique, sont très voisins l'un de l'autre puisque l'Islam est, né chez les Arabes et qu'il fut, au début, propagé par eux, encore qu'il existe des populations arabes ou arabisées qui sont demeurées chrétiennes (Syrie, Liban, Palestine, Iraq, Egypte), et des millions de musulmans qui ne sont ni arabes ni même arabisés (Noirs africains, Berbères, Turcs, Kurdes, Albanais, Iraniens, Afghans, Pakistanais, Indonésiens...). Tous les Berbères auraient pu, comme les Perses et les Turcs, être islamisés en restant eux même si conservant leur langue, leur organisation sociale, leur culture. En théorie, cela leur aurait été même plus facile, puisqu'ils étaient plus h6mbreux que certaines populations qui ont conservé leur identité au sein de l'U ma musulmane, et qu'ils étaient plus éloignés du foyer initial de l'Islam.

Comment expliquer, parallèlement, que l'Africa, la Numidie et même les Maurétanies, qui avaient été évangélisées au même rythme que les autres provinces de l'Empire et qui possédaient des églises vigoureuses, aient été entièrement islamisées alors qu'aux portes mêmes de l'Arabie ont subsisté des populations chrétiennes: Coptes des pays du Nil, Maronites du Liban, Nestoriens et Jacobites de Syrie et d'Iraq ?

LA FIN D'UN MONDE

L'Islam, c'est un truisme, fut introduit, en Afrique comme au Proche-Orient, par la conquête arabe. Nous avons vu combien les épisodes de cette conquête sont mal connus, encombrés de récits légendaires destinés à mettre en valeur les exploits de guerriers placés à la tête de lignées puissantes. Certains récits d'Ibn Abd el Hakam ou d'En Noweiri ont déjà le souffle épique des chansons de geste.

La conquête fut facilitée par la faiblesse des Byzantins. Le patrice Grégoire, qui fut vaincu et tué, la bataille de Suffetula (Sbeitla), s'était lui-même rebellé contre l'empereur de Constantinople. Depuis deux; siècles l'Afrique était la proie de l'anarchie ; tous les ferments de désorganisation et de destruction économique s'étaient rassemblés sur ce malheureux; pays. Depuis l'irruption des Vandales, la plus grande partie des anciennes provinces échappait à l'administration des Etats héritiers de Rome. Le royaume vandale, en Afrique, ne s'étendait qu'à la Tunisie actuelle et à une faible partie de l'Algérie orientale, limitée au Sud par l'Aurès et à l'Est par le méridien de Cirta. Or C. Courtois a montré, en exploitant les récits de Procope et de Corippus, que dès la fin du règne de Thrasamond, vers 520, les nomades chameliers, sous la conduite de Cabaon pénètrent en Byzacène. A partir de cette date, Vandales puis Byzantins doivent lutter constamment contre leurs incursions venues du Sud-Est. Au cours de cette lutte sans cesse renouvelée ils trouvent parfois des alliés parmi les chefs ou rois des populations montagnardes sédentaires ou semi-nomades, mais plus souvent encore ils doivent faire face à la coalition des deux groupes berbères, confondus sous le nom de Maures.

Duc reste de l'Afrique, celle que C. Courtois avait appelée l'Afrique oubliée, nous ne connaissons, pour cette période de deux siècles, que des noms de chefs, de rares monuments funéraires comme les Djedars près de Saïda ou le Gour près de Meknès et les célèbres inscriptions de Masties à Arris (Aurès) et de Masuna à Altava (Oranie). On devine, à travers les bribes transmises par les historiens et par le contenu même de ces inscriptions, que l'insécurité n'était pas moindre dans ces régions " libérées ".

Autre source d'anarchie et de décadence économique, la rupture, devant les Nomades, des ligues de défense et de contrôle. La disparition des zones de culture méridionales, qui fut plus tardive qu'on ne le pensait, fut une première atteinte à la vie sédentaire de l'arrière-pays.

Les querelles théologiques enfin ne furent pas moins fortes chez les Chrétiens d'Afrique que chez ceux d'Orient. L'Eglise, qui avait eu tant de mal à lutter contre le donatisme, est affaiblie dans le royaume vandale par les persécutions, car l'Arianisme est devenu religion d'Etat, L'orthodoxie triomphe à nouveau dès le règne d'Hildéric (525). Au cours de cette période, non seulement de nombreux évêchés semblent avoir disparu mais surtout le particularisme provincial et le repliement accompagnent la rupture de l'Etat romain.

La reconquête byzantine fut, en ce domaine, encore plus désastreuse. Elle réintroduisit en Afrique de nouvelles querelles sur la nature du Christ : le monophysisme et la querelle des Trois Chapitres, sous Justinien, ouvrent la période byzantine en Afrique, la tentative de conciliation proposée par Héraclius, Je monothélisme, à son tour condamné comme une "nouvelle hérésie, clôt cette même période. Alors même que la conquête arabe est commencée, une nouvelle querelle née de l'initiative de l'empereur ConStant Il, celle du Type, déchire encore l'Afrique chrétienne (648).

En même temps s'accroît la complexité sociologique, voire ethnique, du pays, Aux Romano-africains, (Afariq des auteurs arabes) qui habitaient les villes et les campagnes, parfois très méridionales, comme la société paysanne que font connaître les Tablettes Albertini trouvées à une centaine de kilomètres au sud de Tébessa, et aux Maures non romanisés issus des gentes paléoberbères, se sont ajoutés les nomades zénètes, les débris du peuple vandale, le corps expéditionnaire et les administrateurs byzantins (les Roum des auteurs arabes). Cette société devient de plus en plus cloisonnée dans un pays où s'estompe la notion même de l'Etat.

En bref les conquérants arabes, peu nombreux mais vaillants, ne vont pas trouver en face d'eux un Etat prêt à résister à une invasion, mais des opposants successifs : le patrice byzantin, puis les chefs berbères, principautés après royaumes, tribus après confédérations. Quant à la population romano-africaine, enfermée dans les murs de ses villes, bien que fort nombreuse, elle n'a ni la possibilité ni la volonté de résister longtemps à ces nouveaux maîtres envoyés par dieu. La capitation imposée par les Arabes n'était guère plus lourde que les exigences du fisc byzantin, et, au début du moins, sa perception apparaissait plus comme une contribution exceptionnelle aux malheurs de la guerre que comme une imposition permanente. Quant aux pillages et aux prises de butin des cavaliers d'Allah, ils n'étaient ni plus ni moins insupportables que ceux pratiqués par les Maures depuis deux siècles.


LES VOIES DE LA CONVERSION

Nous disions qu'il fallait distinguer l'islamisation de l'arabisation. De fait, la première se fit à un rythme bien plus rapide que la seconde. La Berbérie devient musulmane en moins de deux siècles alors qu'elle n'est pas encore entièrement arabisée, treize siècles après la première conquête arabe.

L'islamisation et la toute première arabisation furent d'abord citadines. La religion des conquérants s'implanta dans les villes anciennes, que visitaient des missionnaires guerriers puis des docteurs, voyageurs rompus aux discussions théologiques. La création de villes nouvelles, véritables centres religieux, comme Kairouan, première fondation musulmane (670), et Fès, création d'Idriss II (809), contribua à implanter solidement l'Islam aux deux extrémités du pays.

La conversion des Berbères des campagnes, Sanhadja ou Zénètes, se fit plus mystérieusement. Ils étaient certes préparés au monothéisme absolu de l'Islam par le développement récent du christianisme, mais aussi par un certain prosélytisme judaïque dans les tribus nomades du Sud et peut-être encore, pour certains, par le souvenir de l'omnipotence du grand dieu africain, nommé Saturne par les Latins, successeur du Baal Hammon punique, dont la pré-éminence sur les autres divinités préparait au monothéisme.

Quoi qu'il en soit, la conversion des chefs de fédérations importantes répandit l'Islam dans le peuple. Les contingents berbères, conduits par ces chefs dans de fructueuses conquêtes faites au nom de l'Islam, furent amenés tout naturellement à la conversion.

Pour gagner le coeur des populations dans les villes et surtout les campagnes, les missionnaires musulmans eurent recours à l'exemple. Il fallait montrer à ces Maghrébins, dont la religiosité fut toujours très profonde, ce qu'était la vraie communauté des Défenseurs de la Foi. Ce fut le ribat, couvent-forteresse occupé par des moines-soldats toujours prêts à défendre la terre d'Islam contre les Infidèles Ou les hérétiques et s'instruisant aux sources de l'orthodoxie la plus rigoureuse. Ces- m'rabtines savent, le cas échéant, devenir des réformateurs zélés et efficaces. Ceux qui, parmi les Lemtouna, avaient fondé un ribat près du Sénégal (ou dans une île du fleuve) furent à l'origine de l'empire Almoravide, qui leur doit son nom (Al-morabitin) au prix d'une hispanisation imposée par l'Histoire.

Lorsque l'Islam fut condamné à une politique "défensive, le ribat militaire protégea le littoral contre les incursions des Byzantins, puis des Francs et Normands de Sicile : certains, comme ceux de Sousse ou de Monastir, sont de véritables citadelles.

Dans les zones non menacées le ribat perdit son caractère militaire pour devenir le siège de religieux très respectés. Des confréries, qu'il serait exagéré d'assimiler aux ordres religieux chrétiens, s'organisent, à des époques plus récentes, en prenant appui sur des centres d'études religieuses, les zaouïa, qui sont1es héritiers des anciens ribats. Ce mouvement, souvent mêlé de mysticisme populaire, est lié au maraboutisme, autre mot dérivé aussi du ribat. Le maraboutisme contribua grandement à achever l'islamisation des campagnes, au prix de quelques concessions secondaires à des pratiques anté-islamiques qui n'entament pas la foi du croyant.

Infiniment plus dangereux pour l'orthodoxie sunnite avaient été dans les premiers siècles de l'Islam ces missionnaires kharedjites venus d'Orient qui, tout en répandant l'Islam dans les tribus surtout zénètes, séparèrent une partie des Berbères de l'orthodoxie musulmane. Si le schiisme kharedjite ensanglanta le Maghreb à plusieurs reprises, il eut le mérite de conserver à toutes les époques, la nôtre comprise, une force religieuse minoritaire mais exemplaire par la rigueur de sa foi et l'austérité de ses moeurs.

Autres missionnaires et grands voyageurs : les daï chargés de répandre la doctrine chiite. On sait le succès extraordinaire de l'un d'eux, Abou Adb Allah, chez les Ketama, qui fut à l'origine de l'empire fatimide. Il faut dire qu'en ces époques qui, en Europe comme en Afrique, nous paraissent condamnées à une vie concentrationnaire en raison de l'insécurité, les clercs voyagent beaucoup et fort loin, ils s'instruisent auprès des plus célèbres docteurs, se mettant délibérément à leur service jusqu'au jour où ils prennent conscience de leur savoir, de leur autorité et deviennent maîtres à leur tour, élaborant parfois une nouvelle doctrine. Ce fut, entre autres, l'histoire d'Ibn Toumert, fondateur du mouvement almohade. Antérieurement, Ibn Yasin avait joué le même rôle dans l'origine des Almoravides.

Il fut cependant des parties de la Berbérie où l'Islam ne pénétra que tardivement : non pas dans les groupes compacts des sédentaires montagnards qui, au contraire, jouèrent très vite un rôle important dans l'Islam maghrébin, comme les Ketama ou les Masmouda, mais chez les grands nomades du lointain Hoggar et du Sahara méridional. Il semble qu'il y eut chez les Touareg, si on en croit leur tradition, une islamisation très précoce, oeuvre des Sohaba (Compagnons du Prophète); mais cette islamisation, si elle n'est pas légendaire, n'eut guère de conséquence. A ces mêmes récits se rattache la présence d'Oqba au Fezzan avant même la fondation de Kairouan. L'idolâtrie subsista chez les Isabaten jusqu'à la conquête touareg. Des missionnaires, les 'anbiya, réintroduisirent l'Islam au Hoggar, sans grand succès. En fait la véritable islamisation ne semble guère antérieure au XVe siècle.

Il est même un pays berbérophone qui ne fut jamais islamisé : les îles Canaries dont les habitants primitifs, les Guanches, étaient restés païens au moment de 1a conquête hispano-normande, aux XIVe et XVe siècles.

LES MÉCANISMES DE L'ARABISATION

L'arabisation suivit d'autres voies, bien qu'elle fût préparée par l'obligation de prononcer en arabe les quelques phrases essentielles d'adhésion à l'Islam. Le Koran, révélation immédiate de Dieu à son Prophète, ne doit subir aucune altération, il ne peut donc être traduit, en conséquence la langue et l'écriture arabes sont sacralisées. Cette contrainte et cette obligation aura contribuèrent grandement à l'arabisation linguistique. Celle-ci fut, pendant la première période (XII-XI e siècles), essentiellement citadine. Un certain nombre de villes maghrébines, surtout sur le littoral, ont conservé une langue assez classique, souvenir de cette première arabisation, renforcée par l'afflux des Andalous chassés d'Espagne au XVe siècle, lesquels étaient le plus souvent des berbères totalement arabisés. L'arabe citadin, classique, fut cependant presque partout submergé par une autre forme plus populaire, rude et mêlée de termes berbères. Cet arabe dialectal, lui-même très divers, est, en fait, l'image linguistique de l'arabisation du Maghreb. Il est issu de la langue bédouine introduite au XIe siècle par les tribus hilaliennes car ce sont elles, en effet, qui ont véritablement arabisé une grande partie des Berbères.

C'est une étrange et à vrai dire assez merveilleuse histoire que cette transformation d'une population de plusieurs millions de Berbères par quelques dizaines de milliers de Bédouins. On ne saurait, en effet, exagérer l'importance numérique des Beni Hilal : quel que soit le nombre de ceux qui se croient leurs descendants, ils étaient, au moment de leur apparition en Ifriqiya et au Maghreb, tout au plus quelques dizaines de milliers. Les apports successifs des Beni Solaïm, puis des Mâqil, qui s'établirent dans le sud du Maroc, ne portèrent pas à plus de cent mille les individus de sang arabe qui pénétrèrent en Afrique du Nord au XIe siècle. Les Vandales, lorsqu'ils franchirent le détroit de Gibraltar pour débarquer sur les côtes d'Afrique en mai 429, étaient au nombre de 80000, ou le double si les chiffres de Victor de Vita ne portent que sur les hommes et les enfants de sexe mâle. C'est à dire que l'importance numérique des deux invasions est sensiblement équivalente. Or que reste-t-il de l'emprise vandale en Afrique deux siècles plus tard? Rien. La conquête byzantine a gommé purement et simplement la présence vandale, dont on rechercherait en vain les descendants ou ceux qui prétendaient en descendre. Considérons maintenant les conséquences de l'arrivée des Arabes hilaliens du XIe siècle: la Berbérie s'est en grande partie arabisée et les Etats du Maghreb se considèrent comme les Etats arabes.

Ce n'est bien entendu ni la puissance génétique des Beni Hilal ni une prétendue extermination des Berbères dans les plaines qui expliquent cette lente transformation.

Les tribus bédouines vont, en premier lieu, porter un nouveau coup à la vie sédentaire, par leurs déprédations et les menaces qu'elles font planer sur les campagnes ouvertes. Elles renforcent ainsi l'action dissolvante des nomades néoberbères qui avaient, dès le Ve siècle, pénétré en Africa et Numidie. Précurseurs des Hilaliens, les nomades zénètes furent facilement assimilés par ces nouveaux venus. Ainsi les contingents nomades arabes, qui parlaient la langue sacrée et en tiraient un grand prestige, loin d'être absorbés culturellement par la masse berbère nomade, l'attirèrent à eux et l'adoptèrent.

L'identité des genres de vie facilita la confusion. Il était tentant pour les nomades berbères de se dire aussi arabes et d'y gagner la considération et le statut de conquérants; voire de chérif, c'est-à-dire descendants du Prophète. L'assimilation était encore facilitée par une fiction juridique: lorqu'un groupe ou une fraction devient le client d'une famille arabe, il a le droit de prendre le nom de son patron, comme s'il s'agissait d'une sorte d'adoption collective. L'existence de pratiques analogues, chez les Berbères eux-mêmes, facilitait encore le processus.

L'arabisation gagna donc en premier lieu les tribus berbères nomades et particulièrement les Zénètes. Elle fut si complète qu'il ne subsiste plus, aujourd'hui, de dialectes Zénètes nomades; ceux qui ont encore une certaine vitalité sont parlés par des Zénètes fixés soit dans les montagnes (Ouarsenis) soit dans les oasis du Sahara septentrional (Mzab).

A la concordance des genres de vie, puissant facteur d'arabisation, s'ajoute le jeu politique des souverains berbères, qui n'hésitent pas à utiliser la mobilité et la force militaire des nouveaux venus contre leurs frères de race. Par la double pression des migrations pastorales et des actions guerrières accompagnées de pillages, d'incendies ou de simples chapardages, la marée nomade, qui désormais s'identifie pour la plus grande partie du Maghreb avec l'arabisme bédouin, s'étend sans cesse, gangrène les Etats, efface la vie sédentaire des plaines. Les régions berbérophones se réduisent à des îlots montagneux, A ces raisons d'ordre ethnosociologique s'ajoutent des modifications climatiques qui, à partir du VIIe siècle, favorisèrent le genre de vie pastoral et nomade aux dépens des agriculteurs sédentaires. ,

AFFIRMATIONS ET RÉALITÉS

Mais ce schéma est trop tranché pour être exact dans le détail. On ne peut faire subir une telle dichotomie à la réalité humaine du Maghreb. Les nomades ne sont pas tous arabisés: il subsiste de vastes régions parcourues par des nomades berbérophones. Tout le Sahara central et méridional, dans trois Etats, est contrôlé par eux. Dans le Sud marocain l'importante confédération des Aït 'Atta, centrée sur le Jbel Sarho, maintient un nomadisme berbère entre les groupes arabes du Tafilalet d'où est issue la dynastie chérifienne, et les nomades du Sahara occidental qui se disent descendre des tribus arabes Mâqil, aujourd'hui contrôlés par les Regueibat. Il faut également tenir compte des petits nomades de l'important groupe Braber du Moyen Atlas: Zaïan, Beni M'Guild, Aït Seghrouchen.


Inversement il ne faudrait pas imaginer que tous les Arabes sont exclusivement nomades; bien avant la période française, qui favorisa, ne serait-ce que par le rétablissement de la sécurité, l'agriculture et la vie sédentaire, des groupes arabophones menaient depuis des siècles une vie sédentaire autour des villes et dans les campagnes les plus reculées. Je citerai, parce qu'il est le plus exemplaire et qu'il se situe à l'opposé du schéma habituellement présenté, le cas des habitants de Petite Kabylie et de l'ensemble des massifs et moyennes montagnes littorales de l'Algérie orientale et du nord de la Tunisie. Tous ces montagnards et habitants des collines sont arabisés de longue date; cependant, vivant de la forêt, d'une agriculture proche du jardinage et de l'arboriculture, ils ont toujours mené une vie sédentaire appuyée sur l'élevage de bovins, Bien d'autres cas semblables dans le Rif oriental, l'Ouarsenis occidental, pourraient être cités.

Mais il n'empêche qu'aujourd'hui, hormis le Sahara, les zones berbérophones sont toutes des régions montagneuses, comme si celles-ci avaient servi de bastions et de refuges aux populations qui abandonnaient progressivement le plat pays aux nomades et semi-nomades, éleveurs de petit bétail, arabes ou arabisés. C'est la raison pour laquelle au XIXe siècle l'Afrique du Nord présentait de curieuses inversions de peuplement : montagnes et collines au sol pauvre, occupées par des agriculteurs, avaient des densités de population bien plus grandes que les plaines et grandes vallées, au sol riche, parcourues par de petits groupes d'éleveurs.


Des nomades restés berbérophones : les Touareg. Ici Touareg Kel Ahoggar séjournant dans les pâturages du Tamesna





Certains groupes montagnards sont si peu adaptés à la vie en montagne que leur origine semble devoir être recherchée ailleurs. Des détails vestimentaires et surtout l'ignorance de pratiques agricoles, telles que la culture en terrasse, dans l'Atlas tellien, amènent à penser que les montagnes ont été non seulement des bastions qui résistèrent à l'arabisation, mais qu'elles furent aussi de véritables refuges, dans lesquels se rassemblèrent les agriculteurs fuyant les plaines abandonnées aux déprédations des pasteurs nomades.

Si la culture en terrasse est inconnue chez les agriculteurs des montagnes telliennes (alors qu'elle est si répandue dans les autres pays et îles méditerranéens) elle est en revanche parfaitement maîtrisée, et certainement de toute antiquité, chez les Berbères de l'Atlas saharien et des chaînes voisines, Les plus belles terrasses se trouvent chez les Chleuh de l'Anti-Atlas (Maroc), mais dans les Monts des Ksour et dans l'Aurès (Algérie) ainsi que chez les Matmata (Tunisie), l'agriculture est normalement pratiquée sur terrasses soigneusement entretenues.

Quelles que soient leurs origines, les Berbères qui occupent les montagnes du Tell sont si nombreux sur un sol pauvre et restreint qu'ils sont contraints de s'expatrier. Ce phénomène, si important en Kabylie, n'est pas récent. Comme les Savoyards des XVIIle et XIXe siècles, les Kabyles se firent colporteurs ou se spécialisèrent, en ville, dans certains métiers: commerce de l'huile, maraîchage...

L'essor démographique consécutif à la colonisation provoqua l'arrivée massive des montagnards berbérophones dans les plaines mises en culture et dans les villes. Ce mouvement aurait pu entraîner une sorte de reconquête linguistique et culturelle aux dépens de l'arabe, or il n'en fut rien. Bien au contraire, le Berbère, qu'il soit Kabyle, Rifain, Chleuh ou Chaouia, arrivé en pays arabe, abandonne sa langue et souvent ses coutumes, tout en les retrouvant aisément lorsqu'il retourne au pays.

Comme les montagnes berbérophones continuent d'être le grand réservoir démographique de l'Algérie et du Maroc; on assiste à ce phénomène apparemment paradoxal: ces pays voient la part de sang arabe, déjà infime, se réduire à mesure qu'ils s'arabisent culturellement et linguistiquement.

Gabriel Camps
Tiré de www.amazighworld.org
 
Une harmonie séculaire entre le spirituel et le temporel

Dans la 1ére moitié du 7ème siècle( premières décennies de la révélation de l’Islam), le Maroc « Mauritanie Tangitane » romaine, tombée dans l’oubli depuis l’aube du 4ème siècle, était terre de confusion et de désordres…Tribus et régions étaient tiraillées entre divers pouvoirs du fait, notamment, de la survivance des influences romaine et byzantine, et surtout du fait d’une indescriptible confusion religieuse : cultes naturistes, traditions animistes, divinités romaines, carthaginoises, confessions diverses…Aucun pouvoir central garantissant la stabilité, la cohésion sociale et la sécurité ne pouvait émerger dans une telle situation de confusion des esprits et des croyances. La désagrégation semblait la voie de fatalité et, l’unité besoin si impérieux, relevait de l’impossible tant son indispensable préalable était inaccessible : une seule et même doctrine religieuse fédérant les esprits et codifiant les comportements des individus et du groupes.

Depuis plus de 13siècles, l’Islam est le ciment qui a donné à ce peuple l’unité spirituelle, secret de la cohésion d’une nation aux origines diverses, et de la continuité d’un état séculaire.

Si la 1ère apparition des troupes de l’Islam au Maghreb remonte à l’expédition menée par le gouverneur d’Egypte Abdellah Ben Saad, contre les byzantins en 647, à Ifriqia (actuelle Tunisie), c’est à partir de 681 que Oqba Ibnou Nafii, fondateur de la ville de Kerouan, et de sa fameuse mosquée ( la 1ère au Maghreb), parcourut l ‘Afrique du Nord- dont les contrées marocaines de Tanger jusqu’a la vallée du Souss- poussant m^me son cheval dans les flots de l’Atlantique pour calmer son célèbre regret de ne pouvoir porter la vérité de l’Islam au delà de cette « mer des ténèbres ».

Le Choix de l’orthodoxie : Sounna et Malékisme

Des ténèbres de l’anarchie et de l’insécurité, la terre marocaine était sortie dès le 1er siècle de l’Hégire, certes grâce à l’islam, mais surtout grâce au choix doctrinal inspirant les institutions et les équilibres qui maintiennent cette nation, dans l’unité, depuis près de 14 siècles. Ce choix étant l’Islam orthodoxe, fondé sur la Sounna ( tradition du prophète), comme source fondamentale après le Coran. Dès le départ, les marocains adoptaient le doctrine sunnite, combattant avec force diverses hérésies. Nombre d’historiens ont relevé comme explication de ce choix doctrinal, le fait que le Maroc ait accueilli comme premiers conquérants et premiers imams ou émirs des gens de Médine, disciples des compagnons du prophète, fondèrent la 1ère dynasties des Idrissides 788/974J.C.

En fait, l’option pour le sunnisme pur et orthodoxe ne peut être dissociée du rite la marqua au Maroc dès l’introduction de L’islam à savoir le rite Malékite ( Imam Malik Ibnou Anas mort en 179/795J.C.

L’illustre savant, juriste et théologien, Cadi Ayyad( 476-544H.) rapporte : « Lorsque Assad Ibnou Fourat (145-213 H/767-835J.C) arriva de Kairouan, muni des livres médinois et Irakiens, quelqu’un lui demanda quelle était la doctrine la plus sûre à suivre, celle de Malik ou celle de Abou Hanifa, Assad lui répondit » si ton ambition est spirituelle, suis la doctrine de Malik, si par contre tu aspires au bonheur temporel, alors suis la doctrine des docteurs irakiens ».

Si l’orthodoxie de la doctrine sunnite mettait la nation marocaine à l’abri des schismes que connut (jusqu'à nos jours) l’Orient , en ancrant un islam prémuni contre toute forme de spéculation humaine (nul pouvoir clérical), le rite malékite donne, lui, toute la dimension de cette orthodoxie qui élève l’acte religieux au dessus du temporel, tant celui-ci est abordé dans ce rite avec un souci constant de réaliser l’équilibre entre l’ambition de l’individu et l’indispensable cohésion et progression de la communauté de la Umma. Le musulman marocain , sunnite et malékite, vit donc l’islam avec une double responsabilité quand à son devenir dans l’au-delà.

Autrement dit, une telle démarche religieuse , soucieuse de sauvegarder à la fois le salut de la communauté dans le temporel et le sort du croyant auprès de Dieu, sera fondamentalement empreinte de modération, de recherche d’équilibre, de tolérance, d’effort d’adaptation à partir d’un référentiel orthodoxe(ijtihad)….

Ce qui semble être un paradoxe, orthodoxie et application dans la modération, est en fait le secret de la réussite de l’islam en terre marocaine. Car une telle relation entre le spirituel (ambition suprême du croyant) et le temporel (devoir incontournable pour l’individu comme pour la communauté) explique en fait , depuis les Idrissides (788-974 J.c) jusqu’à nos jours, le parfait fonctionnement entre le religieux et le politique , ce qui fit bénéficier ce pays d’une continuité d’état séculaire dans une terre d’Islam d’ou l’invention scientifique, l’érudition juridique, la création artistique et le rayonnement civilisationnel, ont débordé jusqu’à Tolède et au delà du fleuve Sénégal. Un type de « management » du temporel est ainsi harmonieusement intégré à une austère orthodoxie quand aux sources des préceptes et recommandations. ce qui se traduit pour l’individu par une grande, voire grave, responsabilisation et c’est ce qui, par conséquent, va légitimer à son profit une liberté d’action et des droits de participation aux faits et gestes menés au nom de la communauté …Ainsi, le rite malékite rencontre tout naturellement la notion coranique de « Choura » ( consultation), si fondamentale, comme référence, pour les débats, de nos jours, sur la démocratie : « le malékisme en Occident ne s’est pas seulement nourri des principes généraux, codifiés par les docteurs de première date . Se voulant pratique, il puisa sa substance dans le fond coutumier propre à la région et chercha à resoudre les cas singuliers qui surgissaient dans la vie quotidienne sans trop verser dans les théories générales. Cette « casuistique » fit du droit malékite, un droit positif, qui n’a rien à envier aux droits positifs modernes.

( « le malékisme, facteur d’unification « in mémorial du Maroc. Tome II ).

C’est avec une telle texture , sunnite et malékite, que l’Islam, au Maroc, a pu ^tre un facteur d’unification depuis près d’un millénaire et demi, et n’enregistrant, sur toute cette période, que quelques incidents entre le politique et le religieux, incidents si mineurs, qu’ils sont à peine signalés par les livres d’histoire.

Une telle harmonie entre le spirituel et le temporel , donnant ses preuves durant des siècles, est, elle aussi, célébrée par l’édification de ce monument sans égal : la mosquée Hassan II.

Le Rite Malékite : Voie médiane d’unification (*)

(…) l’introduction et le développement du rite malékite en Occident musulman sont liés à l’expansion de l’Islam dans ces vastes régions qui s’étendent de la Tripolitaine, à l’est, jusqu’aux confins sahariens du sud-Ouest , englobant ainsi l’Ifriqiya( à peu près l’actuelle Tunisie), le Maghreb central, le Maghreb extrême, l’Andalousie et plus tard le Sénégal et le Niger.

Il est remarquable de constater la rapidité avec laquelle le rite malékite a pris racine dans le nord Ouest africain. C’est que le Malékisme a été considéré non pas seulement comme un des quatre rites apparus à l’aube de l’Islam, mais plus que cela, comme un dogme qui allait être défendu tout le long de son histoire. En ce sens, , le malékisme , rite juridico-religieux, se doublait d’une dimension politique. Aussi servait-il d’assise à l’état et de ferment au corps social.

Sans doute le malékisme avait-il travers é des crises, comme à l’époque des Fatimides d’Ifriqiya ou des Almohades, mais il n’en sortait que plus renforcé, aidé en cela par les souverains eux mêmes, fermes adeptes du sunnisme et de l’orthodoxie, comme du reste par les couches sociales pour qui la tradition du prophète Mohammed, présente un caractère sacré.

C’est que le rite de l’imam de Mèdine, Malik Ibn Anas ( mort en 178 ou 179 de l’Hégire/795JC) s’inscrit dans une lignée de pur sunnisme.

S’appuyant après le coran, sur la tradition , l’école du Hidjaz tient la sunna comme source essentielle de la législation musulmane, contrairement à l’école de Abou Hanifa (mort en 145H/767 JC ) qui a recours au Ra’y ou interprétation rationnelle des sources.

(*) Extraits de : « Malékisme, facteur d’unification », et « l’expansion du Malékisme », par Hassan Sqalli, in le Mémorial du Maroc » Tome II, Rabat 1983.

Malik n’écarta pas le Ra’y pour autant, il utilisa même le raisonnement par analogie (Qiyass) comme le faisait Ach-chafii après lui, mais il n’y recourait que dans la mesure où la sunna faisait défaut. Aussi s’employa- t-il à compiler dans son ouvrage fondamental, Al Mouwatta ( la voie aplanie), tous les hadiths susceptibles de constituer une référence certaine du droit musulman. Bien plus, il fit appel aux propos des compagnons directs du prophètes et aux opinions juridiques ( fatwa) des successeurs ( tabi-oun), adoptant ainsi les pratiques et la jurisprudence des gens de Mèdine (Ahl al Madina), comme source faisant autorité ayant le qiyass.

L’Ijmaa ou consensus des jurisconsultes de Mèdine et à la tradition du prophète est une donnée essentielle pour la compréhension des causes de l’épanouissement du rite malékite en occident musulman (…)

Un facteur d’unification

(…) L’œuvre d’unification entreprise par l’école malékite est considérable. Les Maghrébins et les andalous lui avaient apporté des enrichissement , tant au niveau du corpus, qu’à celui de la méthodologie, voire au niveau institutionnel.

Au niveau du Corpus, jusqu’à l’avènement du malèkisme en occident musulman, seul le Mouattaa de Malik constituait la référence première de l’école, car cet ouvrage, comme l’a dit à juste titre Cadi Abou Bakr Ibn Arabi –« fut le premier à être composé sur la législation musulmane dans une optique d’élaboration des principes des droits et de leur application ».

pourtant, l’ère de la codification proprement dite du droit malékite n’a commencé que depuis que l’Andalou, Abdelmalik Ibn Habib ( mort en 238 H/860JC) a écrit sa Moudawwana, l’un et l’autre ouvrage étant en fait des commentaires du Mowaatta de Malik, élaborés dans la stricte observance des principes et des règles professés par le maître mèdinois.

La Moudawana de Souhnoun est presque une refonte d’un texte initial – la « asadya »- rapporté d’Irak par Assâd Ibn Fourat.

Une voie médiane basée sur « l’Ijtihad »

(…) s’agissant de la méthodologie suivie dans la rédaction des commentaires, des docteurs malékite en Occident, ont pris comme modèle la méthode de Souhnoun beaucoup plus pratique que celle du Mouwattâ. Contrairement au Mouwattâ, qui fournit les hadits, suivis des paroles des compagnons, puis de l’Ijtihad de Malik, la Moudawana adopte le système des questions-réponses pour arriver à la solution des cas juridiques soulevés par Souhnoun lui même.

Cette méthode trouve son origine dans le Coran où de nombreux versets débutent par une question ( posées par les musulmans au prophète) ou encore par la demande d’un avi comme par exemple : « Il te demande ton avis sur les femmes. Dis leur- que c’est Dieu qui apportera son avis sur cette question ». (Coran) .

A la mort du prophète et à la suite des faits nouveaux qui apparaissent quotidiennement, la technique de l’Ijtihad par le biais de l’interprétation du Coran et de la tradition se développa rapidement. Les Hanifites et les Malékites se spécialiseront dans cet exercice, les uns et les autres se référant dans leur avis juridique (Fatwa) au fondateur de leur école, à défaut à ces disciples, aux moujtahidoun parmi eux et, en cas de besoin , ils formulent eux –mêmes leur avis. Mais il reste que la référence au Fatwa des chouyoukhs est une nécessité première. Ainsi dans la Moudawana, Souhnoun pose d’abord la question à son cheikh, Ibn Al –Qâsim ou par d’autres disciples ou encore la réponse d’un compagnon obtenu par Ijtihâd à partir des propos du maître, Souhnoun intervient le plus souvent pour confirmer les fatwa de ses prédécesseurs, commenter et appuyer les thèses de ces chouyoukhs, tout en restant dans les limites du texte initial du Mouattaâ.

(…) la méthode adoptée par Souhnoun a inauguré un système de droit dont l’originalité apparaîtra avec le développement du droit malékite appliqué. Elle a permis d’approfondir et d’enrichir les thèses des choujoukh et d’assurer à l’école de Malik l’homogénéité dont elle avait besoin (…).Cette homogénéité nécessaire à toute école juridique est le meilleur garant de l’unification des règles du madhab.

(…) Certains auteurs tirant argument des différents apports techniques des docteurs maghrébins, soutiennent que ces derniers ont inauguré , sur le plan méthodologique, une voie médiane entre celle d’Abou hanifa et celle de Mâlik. Possédant une connaissance parfaite de la doctrine des deux écoles, les Maghrébins ont fait appel aux arguments de l’une et de l’autre, en s’efforçant de ne pas tomber dans l’imitation servile des deux madhab. De ce fait, ils ont fondé une troisième école, qui serait celle de la Sunna médinoise, associée au Ra’y irakien.

Mais il n’en demeure pas moins que le point de départ de l’ijtihâd maghrébin se trouve dans la doctrine originelle de Mâlik, telle qu’elle a été codifiée par Souhnoun dans la Moudawana.

Des institutions au service de l’unité de la communauté

L’Ijtihad des malékites en Occident s’est distingué enfin sur le plan institutionnel. L’institution de la Choura ou « consultation » est un exemple de l’attachement du Malékisme à la préservation des intérêts généraux de la Umma ou communauté dans son ensemble.

En Andalousie, un conseil consultatif spécial a été institué dès le début du 10ème siècle à Cordoue, composé de jurisconsultes imminents, tous appartenant à l’école malékite, qui avait pour mission d’aider les cadis dans leurs tâche , au besoin en leur apportant les éléments juridiques, afin de motiver leurs jugements.

L’importance des consultations judiciaires à été mise en évidence sous les Almoravides quand il existait une séparation très nette entre les fonctions de Cadi et de Mufti. En droit malékite, le Mufti renseigne sur la règle juridique applicable au cas d’espèce, mais ne dispose nullement d’un pouvoir contraignant pour son application . Ce pouvoir appartient au Cadi, qui l’exerce au nom du souverain.

Du temps d’Ali Ibn Youssef Ibn Tachafin, le Cadi était tenu de demander l’avis des fouqaha avant de rendre son verdict, mais il lui était intérdit de les consulter en public, une chambre spéciale ayant été prévue pour le huit clos. Néanmoins, la présence de quatre Fouqaha était indispensable lorsque le Cadi devait prononcer sa sentence. Il faut dire que sous les Almoravides, Les Fatwa des fouqaha avaient une importance capitale ; elles étaient demandées par le souverain lui même, qui ne prenait ses décisions qu’en présence d’un nombre déterminé de jurisconsultes. N’a t-on pas dit que l’Etat, Almoravide, c’était l’Etat des Fouqaha ?

La fonction d’Ifta ou consultation juridique liée ou non à la judicature avait bonne fortune en occident musulman où elle garda ses distances vis-à vis de l’autorité gouvernementale, contrairement aux pays du Moyen-orient où elle prit place dans la fonction publique.

(…) Les jurisconsultes se sont de tous temps penchés sur les Nawâzil ou études de cas inopinés nécessitant un avis conforme au Fiqh Islamique. Leurs fatwa, qui relèvent par la force des choses du droit appliqué, représentent pour le chercheur d’aujourd’hui une source intarissable de données sur la vie juridique, économique politique et sociale de cette partie du monde arabe. Malheureusement, le corpus des Nawâzil demeure en grande partie à l’état de manuscrits. Citons toutefois deux ouvrages célèbres qui ont été imprimés à Fès au début de ce siècle :

« Al –Miyar »d’al Wancharissi ( mort en 914 H/1508 JC), en 11volumes ;

Les « Nawâzil » de Sidi Mahdi Ouazzani ( mort en 1342 H/ 1923 JC), en quatre volumes.

De la somme de Souhnoun à la somme des avis juridiques sur les Nawâzil, que de chemin parcouru par le malékisme en Occident musulman ! de rite importé d’Orient, il se constitua en école de droit avec ses fondements, ses structures, ses méthodes, ses adeptes. Son évolution fut lente, secouée parfois par des crises graves, mais ce fut une évolution généreuse qui contribua à enrichir le corpus juris musulman dans son ensemble.
 
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Dans la 1ére moitié du 7ème siècle( premières décennies de la révélation de l’Islam), le Maroc « Mauritanie Tangitane » romaine, tombée dans l’oubli depuis l’aube du 4ème siècle, était terre de confusion et de désordres…Tribus et régions étaient tiraillées entre divers pouvoirs du fait, notamment, de la survivance des influences romaine et byzantine, et surtout du fait d’une indescriptible confusion religieuse : cultes naturistes, traditions animistes, divinités romaines, carthaginoises, confessions diverses…Aucun pouvoir central garantissant la stabilité, la cohésion sociale et la sécurité ne pouvait émerger dans une telle situation de confusion des esprits et des croyances. La désagrégation semblait la voie de fatalité et, l’unité besoin si impérieux, relevait de l’impossible tant son indispensable préalable était inaccessible : une seule et même doctrine religieuse fédérant les esprits et codifiant les comportements des individus et du groupes
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N'importe quoi. Le pur discours de propagande officielle au Maroc.





[ Edité par agerzam le 27/9/2004 12:15 ]
 
Ce qui est interessant, c'est que nous avons deux sujets contradictoires qui n'émanent pas de ceux qui les ont posté.
Un pro et un anti.
Seulement on peut en lisant brièvement les deux post, on dicerne un promakhzénien, et un anti-arabe.
Mais le vif du sujet doit etre traiter par nous meme, car nous sommes les mieux placé(e)s, pour parler de nous meme, et ne pas aller fouiller dans les poubelles pour copier ce qui ecrivent sur nous sans réelle connaissance de notre réalité.
Il faut etre dans la peau d'un amazigh pour pouvoir
parler me notre histoire, de l'ossature de la société amazigh.
La chiasse verbale copié pour dire eureka j'ai trouvé la vérité, nous importe peu.
Le pro et l'anti se complètent parfaitement dans la démagogie: NOUS C'EST TOUT SIMPLEMENT AUTRE CHOSE.
La shizophrénie journalistique des nouvelistes en manque de verbe ne fait que nuire à notre cause.
J'ai fait un copié collé comme vous pour montrer que les poubelles du net sont pleine et y a qu'a fouiller. C'est vos idées qui nous interesse, et non de ces orientalo-berbériste qui veulent nous apprendre qui nous sommes: foutaise.
 
allahou akbar! c quoi tout sa encore? la religion na rien a voir avec la politique? c nouveau sa!!! avez vous lus le coran avant de sotir des choses pareils? le coran est notre guide l islam doit etre omniprésent et faut commencer par arreter de passer des conneries de koffard genre studio 2M a la place une petite emission sur notre culture amazith sa serait mieu!

et ouais mes frere l islam n est pas un loisir ou que sais -je mais un mode de vie !
 
C'est surtout un choix personnel !

la religion a à voir avec la politique ?

tout est question de conception...
 
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