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LA MAISON DE LA CULTURE BERBÈRE DE FRANCE"
Pourquoi une Maison de la Culture berbère de France ?
Cet espace est dédié à la Maison de la Culture Berbère de France (MCBF) qui est un projet initié par Salem Chaker, Professeur de berbère à l’Inalco, porté par l’association qui porte le nom du projet.
L’idée de constituer à Paris un lieu permanent, visible et reconnu, pour la culture berbère est ancienne ; c’est une nécessité d’évidence qui correspond à un besoin social flagrant.
L’ensemble des textes publiés dans cette rubrique sont les textes originels, repris du site du Centre de Recherche Berbère.
A rappeler que l’association "Maison de la culture berbère de France", créée le 1er février 2003, a élu domicile à l’Inalco dans les locaux du Centre de recherche berbère.
MCBF
L’idée de constituer à Paris un lieu permanent, visible et reconnu, pour la culture berbère est ancienne [1] ; c’est une nécessité d’évidence qui correspond à un besoin social flagrant.
Un devoir social même, par rapport aux très nombreux berbérophones de France, mais aussi un devoir de mémoire, de préservation et de valorisation par rapport au capital intellectuel, artistique et aux savoirs berbérisants existant en France, dans les familles, dans certaines institutions ; capital qui reste largement inexploité et inaccessible et dont une grande partie risque de disparaître, au minimum de se diluer, faute d’un lieu d’accueil [2] adéquat.
Pourtant, malgré plusieurs initiatives exploratoires au cours des dernières années, cette idée n’a pas encore connu de concrétisation. En fait, un tel projet s’est toujours heurté à la très grande fragmentation du champ berbère en France : fragmentation entre nationalités d’origine (Algériens/Marocais, etc.), universitaires et politiques, intellectuels et artistes, entre obédiences politiques (surtout au cours de la décennie 1990), fragmentation du tissu associatif... clivages multiples et croisés, bien sûr en permanence entretenus par les autorités des pays d’origine à travers leurs divers instruments d’intervention en France.
Car les pays d’origine n’ont jamais vu d’un bon œil se constituer dans "leurs émigrations" des pôles de vie collective, même culturelle, autonomes, échappant à leur contrôle. Selon les pays et les moments, cette volonté de mainmise a été dite et mise en œuvre explicitement ou de manière plus feutrée mais non moins efficace ; ni les berbérophones de France, ni les institutions françaises ne peuvent ignorer cette réalité.
Quant au pays d’accueil, même si une image positive du Berbère et de la culture berbère y a toujours prédominé, les autorités françaises ont longtemps considéré qu’elles ne pouvaient encourager ouvertement et activement la langue et la culture berbères en France : on craignait de provoquer le mécontentement, voire l’ire, d’Alger et de Rabat. D’autant que le "complexe du colonisateur", trop souvent accusé d’avoir naguère pratiqué en Afrique du Nord la politique du "diviser pour régner" en opposant les Berbères aux Arabes, est encore bien présent parmi les élites intellectuelles et les décideurs politiques français. Comme si les éventuels péchés anciens pouvaient justifier que l’on ignore les réalités sociales et culturelles actuelles...
Cependant, un tournant considérable, même s’il reste pour l’instant largement symbolique, s’est produit en 1998-1999 à l’occasion du débat autour de la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires : pour la première fois, la France a adopté une approche tout à fait nouvelle de la question des langues d’origine étrangère.
La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires n’a certes pas été ratifiée par la France (et ne le sera sans doute pas dans un proche avenir), suite à la censure du Conseil constitutionnel, mais le débat autour de la Charte a eu l’immense mérite d’ouvrir pour la première fois la discussion sur le statut des langues d’origine étrangère et d’avoir bousculé, sur la base du raisonnement juridique et de la réalité sociolinguistique, la classique opposition entre "langues territoriales" (= langues régionales) et "langues non-territoriales" (= langues d’origine étrangère). Dans des documents officiels français, le berbère est depuis lors considéré (avec quatre autres langues d’origine étrangère : arabe maghrébin, yiddish, rromani, arménien occidental) comme faisant partie des "langues de la France". Et c’est depuis aussi que la Délégation Générale à la Langue Française (DGLF) est devenue Délégation Générale à la Langue Française et aux Langues de France (DGLFLF).
Il convient également de noter que le rapport des Etats d’origine (Algérie et Maroc) au paramètre berbère a sensiblement évolué au cours de la dernière décennie ; dans les deux pays, on est progressivement passé d’une situation de marginalisation, voire d’ostracisme, à une plus grande tolérance, puis même à un début de prise en charge (avec l’officialisation d’enseignements facultatifs de berbère en Algérie depuis 1995, la création de l’Institut Royal pour la Culture Amazigh au Maroc (octobre 2001), et surtout la reconnaissance constitutionnelle par l’Algérie du statut de "langue nationale" au berbère (mai 2002). Le berbère, la culture berbère ne sont donc plus des objets tabous et politiquement incorrects dans les pays d’origine : la décrispation d’Outre-Méditerranée peut/doit favoriser une approche plus sereine de la question en France.
C’est dans ce contexte nouveau que, j’ai soumis à plusieurs reprises à diverses instances potentiellement concernées [3], l’idée de constituer à Paris un lieu de visibilité et d’initiative pour la culture berbère en France, sous la forme d’un projet de centre culturel berbère.
En octobre 2002, la Mairie de Paris m’a fait connaître sa disponibilité à appuyer une telle initiative, à la condition que nous élaborions un projet porté par un partenariat élargi (Ministère de la Culture, Education Nationale, établissements universitaires, FASILD, Associations, etc.).
J’ai donc repris le dossier initial pour en préciser les contours et ai décidé d’engager les contacts avec tous les acteurs et intervenants potentiels : Institutions [4], acteurs de la culture berbère, associations culturelles et personnalités amies. L’objectif étant de mettre en place le plus rapidement possible le partenariat souhaitable, d’élaborer les statuts d’une association "porteuse" et de poser ainsi les fondations du projet, dans la perspective d’une concrétisation rapide.
L’accueil des Ministères de la Culture, de la DGLFLF et de l’Education nationale est très encourageant et les établissements universitaires sollicités s’impliqueront certainement dans le projet ; cela est bien sûr déjà acquis pour l’INALCO, pôle historique des études berbères en France.
Le Comité de parrainage rassemble dès à présent une liste conséquente de personnalités de la culture et du savoir. Par ailleurs, de nombreuses associations berbères [5] de France apportent leur appui au projet. Enfin, une vingtaine d’universitaires et chercheurs spécialistes reconnus du domaine berbère, ainsi qu’un certain nombre de créateurs et artistes ont accepté de se rassembler pour constituer un noyau de fondation : la quasi totalité des personnes sollicitées a donné son accord.
Le 1er février 2003 a eu lieu à l’INALCO une réunion formelle constitutive qui a vu la naissance d’une association "loi de 1901" dénommée "Maison de la Culture Berbère de France", qui porte désormais le projet [6].
La machine est donc lancée et les premiers échos sont positifs. Le Ministère de la Culture et la DGLFLF apportent leur soutien actif au projet, de même que l’INALCO ; les contacts se poursuivent avec le ministère de l’Education nationale, le FASILD et la Mairie de Paris dont nous pouvons espérer le soutien.
La réussite dépendra de la capacité des amis de la culture berbère et des Berbères de France à se mobiliser durablement et efficacement, dans le respect des différences, dans le respect mutuel, autour de ce projet dont chacun mesure l’importance.
Salem CHAKER,
Professeur des Universités (berbère).
. . . . . . . . . . . . . .
Copyright Tamazgha.fr
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Notes :
[1] On pense notamment aux nombreuses bibliothèques privées, aux archives familiales, aux inédits et manuscrits, aux collections de photos et d’enregistrements sonores, aux collections d’objets...
[2] Principalement le Ministère de la Culture (à partir du 1er mars 1999) et la Mairie de Paris (à partir de juin 2001).
[3] Ont été sollicités : la Mairie de Paris, le Ministère de la Culture (dont la Délegation Générale à la Langue Française et aux Langues de France), le Ministère de l’Education Nationale, la Région Ile-de-France, le FASILD, l’INALCO, l’Université de Paris-8 et l’EHESS.
[4] Les listes complètes de ces soutiens sont fournies plus loin.
[5] Les listes complètes de ces soutiens sont fourines en annexes
[6] Publication au JO du 3 mai 2003 (135e année, n°18, p. 2434, paragraphe 1888
[ Edité par Souss le 29/3/2004 9:54 ]
LA MAISON DE LA CULTURE BERBÈRE DE FRANCE"
Pourquoi une Maison de la Culture berbère de France ?
Cet espace est dédié à la Maison de la Culture Berbère de France (MCBF) qui est un projet initié par Salem Chaker, Professeur de berbère à l’Inalco, porté par l’association qui porte le nom du projet.
L’idée de constituer à Paris un lieu permanent, visible et reconnu, pour la culture berbère est ancienne ; c’est une nécessité d’évidence qui correspond à un besoin social flagrant.
L’ensemble des textes publiés dans cette rubrique sont les textes originels, repris du site du Centre de Recherche Berbère.
A rappeler que l’association "Maison de la culture berbère de France", créée le 1er février 2003, a élu domicile à l’Inalco dans les locaux du Centre de recherche berbère.
MCBF
L’idée de constituer à Paris un lieu permanent, visible et reconnu, pour la culture berbère est ancienne [1] ; c’est une nécessité d’évidence qui correspond à un besoin social flagrant.
Un devoir social même, par rapport aux très nombreux berbérophones de France, mais aussi un devoir de mémoire, de préservation et de valorisation par rapport au capital intellectuel, artistique et aux savoirs berbérisants existant en France, dans les familles, dans certaines institutions ; capital qui reste largement inexploité et inaccessible et dont une grande partie risque de disparaître, au minimum de se diluer, faute d’un lieu d’accueil [2] adéquat.
Pourtant, malgré plusieurs initiatives exploratoires au cours des dernières années, cette idée n’a pas encore connu de concrétisation. En fait, un tel projet s’est toujours heurté à la très grande fragmentation du champ berbère en France : fragmentation entre nationalités d’origine (Algériens/Marocais, etc.), universitaires et politiques, intellectuels et artistes, entre obédiences politiques (surtout au cours de la décennie 1990), fragmentation du tissu associatif... clivages multiples et croisés, bien sûr en permanence entretenus par les autorités des pays d’origine à travers leurs divers instruments d’intervention en France.
Car les pays d’origine n’ont jamais vu d’un bon œil se constituer dans "leurs émigrations" des pôles de vie collective, même culturelle, autonomes, échappant à leur contrôle. Selon les pays et les moments, cette volonté de mainmise a été dite et mise en œuvre explicitement ou de manière plus feutrée mais non moins efficace ; ni les berbérophones de France, ni les institutions françaises ne peuvent ignorer cette réalité.
Quant au pays d’accueil, même si une image positive du Berbère et de la culture berbère y a toujours prédominé, les autorités françaises ont longtemps considéré qu’elles ne pouvaient encourager ouvertement et activement la langue et la culture berbères en France : on craignait de provoquer le mécontentement, voire l’ire, d’Alger et de Rabat. D’autant que le "complexe du colonisateur", trop souvent accusé d’avoir naguère pratiqué en Afrique du Nord la politique du "diviser pour régner" en opposant les Berbères aux Arabes, est encore bien présent parmi les élites intellectuelles et les décideurs politiques français. Comme si les éventuels péchés anciens pouvaient justifier que l’on ignore les réalités sociales et culturelles actuelles...
Cependant, un tournant considérable, même s’il reste pour l’instant largement symbolique, s’est produit en 1998-1999 à l’occasion du débat autour de la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires : pour la première fois, la France a adopté une approche tout à fait nouvelle de la question des langues d’origine étrangère.
La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires n’a certes pas été ratifiée par la France (et ne le sera sans doute pas dans un proche avenir), suite à la censure du Conseil constitutionnel, mais le débat autour de la Charte a eu l’immense mérite d’ouvrir pour la première fois la discussion sur le statut des langues d’origine étrangère et d’avoir bousculé, sur la base du raisonnement juridique et de la réalité sociolinguistique, la classique opposition entre "langues territoriales" (= langues régionales) et "langues non-territoriales" (= langues d’origine étrangère). Dans des documents officiels français, le berbère est depuis lors considéré (avec quatre autres langues d’origine étrangère : arabe maghrébin, yiddish, rromani, arménien occidental) comme faisant partie des "langues de la France". Et c’est depuis aussi que la Délégation Générale à la Langue Française (DGLF) est devenue Délégation Générale à la Langue Française et aux Langues de France (DGLFLF).
Il convient également de noter que le rapport des Etats d’origine (Algérie et Maroc) au paramètre berbère a sensiblement évolué au cours de la dernière décennie ; dans les deux pays, on est progressivement passé d’une situation de marginalisation, voire d’ostracisme, à une plus grande tolérance, puis même à un début de prise en charge (avec l’officialisation d’enseignements facultatifs de berbère en Algérie depuis 1995, la création de l’Institut Royal pour la Culture Amazigh au Maroc (octobre 2001), et surtout la reconnaissance constitutionnelle par l’Algérie du statut de "langue nationale" au berbère (mai 2002). Le berbère, la culture berbère ne sont donc plus des objets tabous et politiquement incorrects dans les pays d’origine : la décrispation d’Outre-Méditerranée peut/doit favoriser une approche plus sereine de la question en France.
C’est dans ce contexte nouveau que, j’ai soumis à plusieurs reprises à diverses instances potentiellement concernées [3], l’idée de constituer à Paris un lieu de visibilité et d’initiative pour la culture berbère en France, sous la forme d’un projet de centre culturel berbère.
En octobre 2002, la Mairie de Paris m’a fait connaître sa disponibilité à appuyer une telle initiative, à la condition que nous élaborions un projet porté par un partenariat élargi (Ministère de la Culture, Education Nationale, établissements universitaires, FASILD, Associations, etc.).
J’ai donc repris le dossier initial pour en préciser les contours et ai décidé d’engager les contacts avec tous les acteurs et intervenants potentiels : Institutions [4], acteurs de la culture berbère, associations culturelles et personnalités amies. L’objectif étant de mettre en place le plus rapidement possible le partenariat souhaitable, d’élaborer les statuts d’une association "porteuse" et de poser ainsi les fondations du projet, dans la perspective d’une concrétisation rapide.
L’accueil des Ministères de la Culture, de la DGLFLF et de l’Education nationale est très encourageant et les établissements universitaires sollicités s’impliqueront certainement dans le projet ; cela est bien sûr déjà acquis pour l’INALCO, pôle historique des études berbères en France.
Le Comité de parrainage rassemble dès à présent une liste conséquente de personnalités de la culture et du savoir. Par ailleurs, de nombreuses associations berbères [5] de France apportent leur appui au projet. Enfin, une vingtaine d’universitaires et chercheurs spécialistes reconnus du domaine berbère, ainsi qu’un certain nombre de créateurs et artistes ont accepté de se rassembler pour constituer un noyau de fondation : la quasi totalité des personnes sollicitées a donné son accord.
Le 1er février 2003 a eu lieu à l’INALCO une réunion formelle constitutive qui a vu la naissance d’une association "loi de 1901" dénommée "Maison de la Culture Berbère de France", qui porte désormais le projet [6].
La machine est donc lancée et les premiers échos sont positifs. Le Ministère de la Culture et la DGLFLF apportent leur soutien actif au projet, de même que l’INALCO ; les contacts se poursuivent avec le ministère de l’Education nationale, le FASILD et la Mairie de Paris dont nous pouvons espérer le soutien.
La réussite dépendra de la capacité des amis de la culture berbère et des Berbères de France à se mobiliser durablement et efficacement, dans le respect des différences, dans le respect mutuel, autour de ce projet dont chacun mesure l’importance.
Salem CHAKER,
Professeur des Universités (berbère).
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Notes :
[1] On pense notamment aux nombreuses bibliothèques privées, aux archives familiales, aux inédits et manuscrits, aux collections de photos et d’enregistrements sonores, aux collections d’objets...
[2] Principalement le Ministère de la Culture (à partir du 1er mars 1999) et la Mairie de Paris (à partir de juin 2001).
[3] Ont été sollicités : la Mairie de Paris, le Ministère de la Culture (dont la Délegation Générale à la Langue Française et aux Langues de France), le Ministère de l’Education Nationale, la Région Ile-de-France, le FASILD, l’INALCO, l’Université de Paris-8 et l’EHESS.
[4] Les listes complètes de ces soutiens sont fournies plus loin.
[5] Les listes complètes de ces soutiens sont fourines en annexes
[6] Publication au JO du 3 mai 2003 (135e année, n°18, p. 2434, paragraphe 1888
[ Edité par Souss le 29/3/2004 9:54 ]