Max Weber : un sociologue à découvrir.

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Weber, Max (1864-1920).


Weber est de tous les sociologues modernes celui dont le rayonnement fut et reste le plus grand, tant par l'admiration que par la contestation qu'il suscite.

Certaines de ses œuvres continuent à faire l'objet de vifs débats, comme à l'époque de leur parution. On a souligné son extraordinaire personnalité, son érudition encyclopédique et son tempérament volcanique, mis au service d'une vision particulièrement aiguë des choses.

Depuis la première traduction en russe d'une de ses oeuvres jusqu'aux travaux qui se sont multipliés au Japon, il n'a cessé d'influencer d'une manière déterminante l'évolution de la sociologie dans tous les pays. On aurait cependant tort de ne considérer que l'oeuvre du sociologue, car Weber fut aussi un remarquable juriste, un brillant économiste, un historien de grande classe.

Mais de nos jours on met davantage l'accent sur la dimension philosophique et politique de sa pensée, car, en ce domaine aussi, il fut l'égal des plus grands esprits de sa génération, par exemple Husserl, Simmel ou Scheler.

Il faudra attendre Raymond Aron pour commencer à découvrir une présentation plus générale de ses écrits. De nos jours, c'est un sociologue consacré dont la pensée est une source importante de référence pour de nombreux sociologues contemporains.

I. Les fondements de la sociologie wébérienne.
Il définit la sociologie comme " une science qui se propose de comprendre par interprétation l'activité sociale et par-là d'expliquer causalement son développement et ses effets ". Il s'agit donc d'analyser l'action sociale. Raymond Boudon considère que Weber est le fondateur de la démarche individualiste dans les sciences sociales.

A. L'action sociale comme objet central de la sociologie.

1. La compréhension des phénomènes sociaux est immédiate et non indirecte comme ceux de la nature. L'observateur doit donc se placer du point de vu de l'acteur pour comprendre le sens subjectif qu'il donne à son action. Le sociologue doit reconstituer conceptuellement les institutions sociales et leur fonctionnement de même, il doit faire le récit de ce que l'on ne verra jamais deux fois, c'est à dire qu'il doit rechercher à la fois le général et le singulier. Enfin, on ne peut comprendre les actions humaines hors de leur système de valeurs et de croyances. Ainsi se pose le problème de l'objectivité du savant. Il doit donc refuser tout jugement de valeur et tenir compte du rapport aux valeurs que l'observateur peut choisir de sélectionner si celles-ci ont constitué un enjeu dans la société étudiée. Il ne faut donc pas rechercher uniquement des relations générales et uniformes, mais saisir les phénomènes dans leur singularité historique (il faut rechercher les causalités sociologiques et les causalités historiques qui sont complémentaires. Celles-ci sont partielles et probabilistes. C'est à dire que Weber refuse le déterminisme).

2. L'action sociale n'englobe pas l'ensemble des activités mais seulement celles qui sont orientés vers autrui, cet autrui pouvant prendre des caractéristiques très variées (individu ou groupe, connu ou inconnu, réel ou abstrait). De même le sens de l'action n'est pas uniforme puisque ses orientations dépendent des degrés de conscience plus ou moins élevés qu'il répertorie sous 4 idéal-types même si l'action est en fait la combinaison de plusieurs orientations.

B. Motivations et idéal-type.

1. L'approche weberienne privilégie la recherche des motivations de l'acteur. Celles-ci peuvent être rangées en deux catégories : celles qui sont invoquées par les acteurs et celles qui sont découvertes par le chercheur. Néanmoins, les individus agissent, le plus souvent, sans savoir clairement ce qu'ils font et sans conscience précise de la réaction des autres. L'action sociale doit donc dans la mesure du possible, être évaluée par rapport à une action idéal-typique qui serait rationnelle.

2. L'idéal-type est une reconstruction stylisée d'une réalité dont l'observateur a isolé les traits les plus significatifs, il s'agit donc d'un modèle d'intelligibilité. Par exemple, la bureaucratie est un idéal-type c'est à dire une forme pure dont on ne rencontre jamais aucun exemplaire dans la réalité mais qui permet de cerner les tendances propres à cette catégorie d'organisation sociale (il en va de même pour le modèle du consommateur rationnel).

En ce sens, l'idéal-type va devenir l'instrument privilégié de la recherche du sens et de l'explication causale. Il possède un double statut : il permet de rendre compte d'une situation historique singulière et il permet de rationaliser une pluralité de situations historiques.

Il existe 4 idéaux types. Si l'acteur n'a qu'une faible conscience du sens de l'orientation de son action, celle-ci sera gouvernée par un comportement traditionnel (par coutume, par habitude) ou par un comportement affectuel (par sentiment ou émotion). Si l'acteur a une forte conscience du sens de l'orientation, il pourra s'agir d'une action rationnelle en valeur (par conviction) ou d'une action rationnelle en finalité (par confrontation rationnelle des moyens et des buts).

II. Quelques théories weberiennes
A. Les grands thèmes de l'oeuvre économie et société.

1. Realtion sociale, communalisation et sociation. Weber s'intéresse à l'action sociale en tant qu'elle est une relation sociale. Mais quel est le type d'accord qui relie les individus entre eux ? La communalisation (sentiment subjectif d'appartenir à une même communauté) ou la sociation (compromis ou coordination d'intérêts motivés rationnellement).

2. Pouvoir et domination. Toutes les relations sociales ne sont pas équilibrées, c'est à dire qu'il existe une relation d'infériorité/supériorité résultant de l'usage de la force physique ou de situations légitimes. Il existe trois formes principales de domination : charismatique (on suit la personne du chef), traditionnelle (on obéit à la personne du détenteur du pouvoir déterminé par la tradition. ou légale-rationnelle (on obéit à un ordre impersonnel).

3. La bureaucratie. Le modèle le plus pur de la domination légale-rationnelle est la direction administrative bureaucratique. Celle-ci se caractérise par la hiérarchie, un pouvoir fondé uniquement sur la compétence, une réglementation impersonnelle, la limitation du favoritisme... La bureaucratie se définie aussi par l'organisation qu'elle sert, l'état. Or ce dernier possède le monopole de la violence légitime. Il faut donc qu'il apparaisse comme légitime.

4. La rationalisation. Pour lui, la rationalité tend à s'imposer dans tous les domaines, les actions rationnelles en finalité tenant une part toujours croissante. Par ce processus les rapports sociaux sont dépersonnalisés et universalisés.

5. Le désenchantement du monde. La rationalisation conduit à un recul du religieux et du magique dans les rapports qu'entretiennent les individus avec leur environnement. Ainsi la rationalisation enlève aux éléments leur part de mystère, marginalise la place du mythe et de la magie. Aussi l'homme ne se fait plus d'illusions car il peut comprendre, maîtriser et prévoir. Néanmoins, ce désenchantement conduit à une perte du sens donné par la religion.

B. L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme.

Selon Weber, c'est l'éthique protestante qui constitue un facteur explicatif (et non une cause suffisante et nécessaire) de l'essor du capitalisme. Il s'intéresse donc au rapport entre la religion et la société, c'est à dire entre le domaine des valeurs et les pratiques économiques.

Il existe un esprit du capitalisme indépendant du capitalisme lui-même. Ainsi, l'idéal-type presque pur du capitalisme peut s'observer bien avant que n'apparaisse la grande industrie concentrée. Weber reprend l'idée selon laquelle le capitalisme nait au XVIe siècle dans les milieux de confession protestante. Le système de valeurs catholiques qui forge la mentalité de l'occident chrétien est un obstacle au capitalisme (valorisation de la pauvreté, de la charité, critique du prêt à intérêt...). Le calvinisme, au contraire encourage un comportement congruent avec le capitalisme (valorisation du travail, notion de prédestination...) : le croyant doit donc se comporter comme un moine chez qui le travail et l'entreprise remplace la prière et la contemplation. La conception que chaque religion se fait du salut est essentielle.

Septembre 1999

[ Edité par Agraw_n_Bariz le 17/7/2005 12:27 ]
 
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