The Berbers

Augustin

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Q&A: The Berbers


Algeria's Berbers revere slain singer Matoub Lounes
For centuries Berbers have fought to prevent their language and culture from being swamped by Arabs. Most numerous in Morocco, they are scattered across nine countries. Their voice has been most loudly heard, amidst outbreaks of violence, in Algeria.

Q: Who are they?

The Berbers are a non-Semitic people who since prehistoric times inhabited the Mediterranean coastline from Egypt to the Atlantic. They dominated North Africa until it was conquered by Arabs in the 7th century.

Ethnically, a majority of Moroccans and Algerians are Arabicised Berbers. Today it is more language and culture that set Berbers apart. Berber speakers account for some 50% of Moroccans and 30% of Algerians.

Q: Where does the name come from?

One theory derives 'Berber' from Barbaros, ancient Greek for 'Outsiders'.


Berbers call themselves 'Imazighen' (Free), plural of 'Amazigh'. They call the Maghreb 'Tamazgha', or Land of the Imazighen.


Q: What do they speak?

Tamazight belongs to the Afro-Asiatic family and is related to ancient Egyptian and Ethiopian.

The Moroccan government wants Tamazight taught in all schools within 10 years. It is recognised as a national language in Mali and Niger.

In 2003 the Algerian authorities also made Tamazight a national language. But Berbers there want it to have equal status, as an 'official language', alongside Arabic.

Where do they live?

Berbers are found in Morocco, Algeria, Libya, Tunisia, Egypt, Mali, Niger, Burkina Faso, Mauritania.

In Morocco and Algeria, they form groups with different dialects.

Moroccan groups (Berber names in brackets): Shleuh (Ishalhiyan), in the High Atlas, Tashalhit dialect; Imazighen (Imazighen), Middle Atlas/Eastern High Atlas, Tamazight dialect; Rifans (Irifiyan), Northern Morocco, Tarifit dialect.

Algerian groups: Kabyles (Taqbaylit), Kabylie region, Kabyle dialect; Chaouia (Ishawiyan), Eastern Algeria, Tashawit dialect; Mozabites (Imzabiyan), northern edge of Sahara, Tamzabit dialect; Tuaregs (Tamachaq), extreme south, Tuareg dialect.


Q: Where are the other populations?

Libya: In Jabal Nefusa, Zwara and Ghadamis.

Tunisia (just 1% of the population): In Djerba, Tataouine, Metmata and east of Gafsa.

Egypt: In the Siwa Oasis near the Libyan border.

Tuareg: Some 600,000 Tuareg Berbers live in Mali and 400,000 in Niger. Tuareg Berbers also found in Algeria, Libya, Burkina Faso and Mauritania. Their total is put at 1.5-2.5 million.

Canaries: The indigenous people were Berber. The language survived till the Spanish invasion in the 15th century. The first World Amazigh Congress was held in Gran Canaria (Tafira in Berber) in August 1997.

Kabyle Berbers: Key dates
1963-65: Berber rebellion
March-April 1980: 'Berber Spring'
September 1994-April 1995: School boycott
June 1998: Singer Matoub Lounes killed
April 2001: Wave of unrest starts
June 2001: Citizens' Movement issues demands
Q: Who are the Kabyle Berbers?

This group is the most active in promoting Berber identity. Kabylie region, east of Algiers, is home to some 5 million Berbers.

It comprises the provinces of Tizi Ouzou, Bejaia and Bouira. Some 50% of neighbouring Setif, Bordj Bou Arreridj and Boumerdes provinces are Kabyle speakers. About half the 3-million-strong population of Algiers are Kabyles.

Q: Why conflict with the government?

Whereas Algeria's constitution says Islam is the state religion and Arabic the official language, the Kabyles see their cultural and linguistic heritage in pre-Islamic North Africa.

After Algeria gained independence in 1962, the Kabyles confronted the new government.

The Socialist Forces Front (FFS), founded by war hero Hocine Ait Ahmed, led a two-year rebellion from 1963 to 1965.

Q: What was the Berber Spring?

In March 1980 police stopped writer Mouloud Mammeri from entering Tizi Ouzou to give a lecture on ancient Berber poetry.
Students took to the streets in Kabylie region and later in Algiers. On 20 April security forces stormed Tizi Ouzou university.

These events, known as the 'Berber Spring', centred on the language issue, which has remained a focus of discontent.

The Berber Cultural Movement organised a rally in 1990 in Algiers to call for language recognition. The same demand was behind a school boycott in the Berber region from September 1994 to April 1995.

Who was Matoub Lounes?
Matoub Lounes was a singer who asserted the linguistic and cultural rights of the Kabyles.

He was killed in an ambush in June 1998, shortly after his latest album parodied the national anthem. His death sparked weeks of violent protests.

Q: What is the Citizens' Movement?

In April 2001 a student was killed in police custody in Tizi Ouzou, sparking riots which spread to other provinces.

Over 120 people are said to have died in clashes which continued for much of 2001.

A 'Citizens' Movement' emerged in the Berber provinces. In June 2001 the movement met in El Kseur (Bejaia Province), and drafted the El Kseur Platform. It listed 15 demands, including full recognition for Tamazight.

In 2004 Algerian Berbers threatened to boycott the presidential election over the language issue.

BBC Monitoring, based in Caversham in southern England, selects and translates information from radio, television, press, news agencies and the Internet from 150 countries in more than 70 languages.
 
lalameriem a écrit :
non chacun pour soi et dieu pour tous ma petite sawsane! :-D :p

D'accord, merci lala, c'est moi qui l'a cherché j'avoue :-D
la roue tourne ma petite lala ;-)
 
je suis là et à votre à tous disposition pour la traduction
et on est pas égoïste comme mariame
nos valeurs vont far beyond the narrowest individualist considerations
 
assif76 a écrit :
je suis là et à votre à tous disposition pour la traduction
et on est pas égoïste comme mariame
nos valeurs vont far beyond the narrowest individualist considerations

Merci assif, mais lala plaisantais ;-)
On attends la traduc!
 
le texte commence par faire le point sur
les evenements et les emeutes qui ont eu lieu dans la kabelie en papelant que les berbères qui sont les autochtones du mgrebe se reveillent et commencent à réclamer leurs droits linguistiques et culturelles
 
C'est un article fait par la BBC sur les berbéres en afrique du nord...cet article rappelle l'origine des imazighens et un bref apperçu historique...ensuite, il préciseles différentes branches de la langue tamazight et leur répartition géographique. et enfin, il promet le réveil des berberes (renaissance) et revendications identitaires, culturelles et linguistiques...

Enjoy it !
 
" Amazigh tu redeviendras. "
Ahmed R. Benchemsi, correspondant au Maroc
Jeune Afrique / L'Intelligent, n° 2102-2103 - du 24 avril au 7 mai 2001

À la "question berbère", il y a deux réponses autorisées le mépris et l’anathème. Selon l’humeur des officiels bien-pensants, les militants berbéristes sont soit " les pathétiques défenseurs d’une cause marginale et perdue d’avance ", soit " des serpents inoculant le venin de la discorde dans le cœur des enfants de ce pays ". Ce qui est d’ailleurs contradictoire : si la cause est vraiment éculée, elle ne devrait pas constituer un facteur de discorde. Il n’empêche. Même de mauvaise foi, ces arguments permettent aux autorités Marocaines d’éviter le sujet de la berbérité. Il ne saurait y avoir qu’une seule vérité, inscrite dans la loi fondamentale du royaume : le Maroc est "arabe".

Peut-être, mais pas les Marocains. Pas tous, du moins, puisqu’une partie d’entre eux se revendique Amazigh. Il ne s’agit pas là d’ethnicité. Chacun sait que " l’ascendance pure " est une chimère, dont la poursuite peut, effectivement, se révéler dangereuse pour la stabilité d’un pays. C’est pourquoi on préfère dire que le Maroc est partagé entre arabophones et berbérophones. Dans quelles proportions ? Secret d’État !

Du reste, le clivage n’est pas aussi net qu’on peut le penser. La darija, marocain dialectal et " vraie " langue du pays, par opposition à l’arabe classique, est un parfait équilibre linguistique entre arabe et berbère, avec même quelques touches de français et d’espagnol, voire, dans le parler néo-urbain de Casablanca et des grandes villes... d’anglais !

Officiellement, le berbère, ou tamazight, n’est pas considéré au Maroc comme une langue, mais comme un ramassis de " dialectes ". Ce qui est absurde : un " dialecte " est forcément dérivé d’une langue et, en l’occurrence, il ne s’agit pas de l’arabe. " Autorisés " par Hassan II au milieu des années quatre-vingt-dix en réponse à l’agitation des milieux berbéristes, les trois bulletins d’information " en dialectes " de la première chaîne (le tarifit, le tamazight et le tachelhit) constituent, pour les berbérophones, une énorme farce. C’est comme si, en France, on présentait un JT avec l’accent marseillais, un autre avec l’accent parisien et un troisième avec l’accent alsacien... en les présentant comme des " dialectes " dans le but de démontrer que le français n’est pas une langue unifiée. La mystification va encore plus loin. Dans les manuels d’histoire, on enseigne la maxime suivante aux petits Marocains : " Les premiers habitants du Maroc sont les Berbères. Ils sont venus du Yémen et de Syrie, en passant par l’Éthiopie et l’Égypte. " Ibn Khaldoun (mort en 1406), père de la sociologie, écrivait il y a déjà six siècles dans son Histoire des Berbères : " L’opinion qui les fait émigrer de Syrie [...] est tellement insoutenable qu’elle mérite d’être rangée au nombre des fables. " Pourquoi affirmer, en dépit de toute logique, que les Berbères viennent de la péninsule arabique ? Sans doute pour suggérer qu’ils sont d’origine arabe... ce qui justifie a posteriori la conquête arabe de la Berbérie menée au VIIIe siècle par Oqba Ibn Nafaâ !

L’histoire officielle du Maroc donne de cette conquête une version idyllique : l’armée islamique venue d’Arabie porter le message du Prophète aurait été accueillie pacifiquement par des peuplades quasi primitives. Quelque temps plus tard, ces " bons sauvages " auraient été subjugués par un chérif (descendant du Prophète) venu d’Arabie et nommé Moulay Idriss. Celui-ci, déclaré sultan, aurait fondé le Maroc. " Supercherie ! "dénoncent les lettrés. " Que l’on cesse de faire ânonner à nos enfants, s’insurge l’académicien Mohamed Chafik, la fable du Maroc inventé, créé de toutes pièces, voici seulement deux douze siècles, par un homme, un seul, dans un désert vide de toute humanité, de toute intelligence et de tout sens politique ! " Les historiens sont formels : le trône de Maurétanie a été fondé au IIIe siècle avant J.-C. par le souverain berbère Baga. Or Maurétanie n’est que le mot grec pour " extrême Occident ", ce qui a été traduit plus tard en arabe par " El-Maghrib El-Aqsa " - en abrégé, Maghrib, ou Maroc. Et Oqba, onze siècles plus tard, n’a pas été accueilli avec des fleurs, loin s’en faut. Il a dû, au contraire, batailler pendant des décennies pour - comme tous les conquérants - s’accaparer les richesses du pays, et, accessoirement, imposer l’islam. L’arrivée d’Oqba, puis celle de Moulay Idriss, est le début d’un très long processus d’arabisation, sous couvert d’islamisation. L’arabe devient peu à peu la langue dominante parce que langue du Coran. Mais pas forcément celle du pouvoir. L’histoire officielle du Maroc oublie volontiers de préciser, par exemple, que Tariq Ibn Ziyad, conquérant de l’Andalousie, était un Berbère du Rif. Comme elle s’abstient de rappeler que les dynasties almoravide et almohade (XIe et XIIe siècles), sous l’empire desquelles le Maroc s’étendait de l’Espagne jusqu’au fleuve Sénégal, étaient berbères.

C’est à partir de la dynastie mérinide (fin du XIIe-XIIIe siècles) que la langue arabe s’impose à nouveau dans les cercles du pouvoir. Et que la siba (" dissidence ", attitude observée de tout temps par les tribus marocaines réfractaires au Makhzen - pouvoir central) devient un phénomène essentiellement berbère. Les dynasties suivantes considèrent les Berbères avec suspicion, et le fossé entre ceux-ci et les Arabes a commencé à se creuser. Puis s’est élargi au fil du temps… jusqu’à l’irruption de la France. Ayant achevé son œuvre de " pacification ", puis d’élimination des dernières poches de siba, le protectorat français, en partant, offre à la dynastie alaouite un cadeau inestimable : un Maroc uni sous sa houlette. Or les Alaouites se revendiquent arabes, sans hésiter. Pourtant, les mères de nombreux rois alaouites (dont Mohammed VI) sont issues de tribus berbères…

Parmi les cadres du mouvement national, et surtout les activistes de l’armée de libération, il y avait aussi beaucoup de Berbères. Pendant la lutte contre les Français, ils avaient mis leur revendication identitaire de côté, pensant naturellement que le Maroc libre serait bilingue et biculturel. Mauvais calcul. Eux-mêmes seront certes intégrés parmi l’élite (militaire, puis, progressivement, civile) de la jeune nation. Mais pas leur langue, ni leur identité.

Très tôt, la diversité culturelle est perçue par le pouvoir comme un ferment de division. Elle est, à ce titre, fermement combattue. Avec l’aide de chantres de l’arabité comme Allal El-Fassi, figure historique du parti de l’Istiqlal, la monarchie va imposer l’arabe comme seule langue légitime (et constitutionnelle) du royaume indépendant. Administration, justice, écoles, hôpitaux, médias... n’en n’échappera au rouleau compresseur de l’arabisation. Dans le but, officiellement, de faire pièce au français - mais personne n’ose imaginer que le berbère puisse aussi constituer un substitut à la langue de l’ex-occupant honni. Quelques voix isolées le suggèrent, mais elles sont vites dispersées par le souffle ardent du panarabisme des années soixante et soixante-dix. Comme l’écrit Mohamed Chafik, " en regard du redoutable arsenal de mythes valorisateurs au service de l’arabisme, les gesticulations de la berbérité ne font pas le poids ". Elles sont même carrément écrasées, au point que l’État civil refuse souvent d’octroyer des prénoms berbères aux nouveau-nés. Dans un autre domaine, on refuse à l’art berbère le droit d’évoluer. Un chorégraphe a ainsi été violemment décrié, avant d’être contraint à l’exil. Son crime : avoir tenté de " dénaturer " la danse berbère traditionnelle ahidouss. Celle-ci ne saurait sortir des limites " acceptables " du folklore. Malgré ce que les plus enflammés qualifient d’ " ethnocide programmé par l’arabisme triomphant ", il y aura une renaissance berbère. Discrète, progressive, mais réelle. Son vecteur : le " cheval de Troie académique " dont, juste retour des choses, la France avait semé les graines. Pendant le protectorat, en effet, l’université française, qui considérait le tamazight comme une langue orientale (sic !) à part entière, avait sanctifié la culture et l’histoire berbères en faisant un objet d’études scientifiques. À partir des années soixante, les études berbères explosent. En quinze ans, une trentaine de thèses en histoire, en littérature et en linguistique berbères sont publiées, et les travaux de maîtrise et de troisième cycle consacrés au sujet se comptent par centaines. Les auteurs, de retour au Maroc en qualité de professeurs, deviennent les fers de lance de l’émancipation berbère naissante.

La monarchie ne tarde pas à réagir. En 1982, une dizaine d’universitaires et de cadres berbères sont emprisonnés pendant un mois. Dans une revue qu’ils venaient de créer, ils avaient affirmé que le berbère était une langue, au même titre que l’arabe. L’auteur de cette intolérable assertion passe un an derrière les barreaux, après avoir refusé de demander grâce à Hassan II. L’événement ne fait cependant pas trop de vagues ; nous sommes encore dans les " années de plomb ", et le mouvement est, de surcroît, très émietté. Un embryon d’unification s’ébauche en 1991, quand six associations se regroupent pour rédiger une plate-forme revendicative dite " charte amazighe " ? Mais cela ne va guère plus loin. Trois ans plus tard, les associations se sont multipliées et ont gagné en influence. La tentative d’union est rééditée par la création du Conseil de coordination des associations amazighes au Maroc. Mais la " montée d’adrénaline " ne survient que lorsque, la même année, plusieurs manifestants sont arrêtés et condamnés parce qu’ils brandissaient, à l’occasion du 1er mai, une banderole en tifinagh (alphabet libyque). On craint, cette fois, l’explosion, mais elle est évitée par la médiation des associations. Hassan II lâche tout de même du lest en libérant les prisonniers, en promettant que le berbère sera bientôt enseigné dans les écoles (promesse demeurée à ce jour lettre morte) et en autorisant les fameux flashs télé " en dialectes ".

Après la mort de Hassan II, la question berbère reprend de la vigueur, et les militants berbéristes de l’assurance. Le 1er mars 2000, un grand pas est franchi : un " manifeste berbère ", fruit de deux ans de débats intenses, est signé par 229 personnes, parmi la fine, fleur des intellectuels berbérophones Marocains (voir ci-dessous). Outre celle du rédacteur du manifeste Mohamed Chafik, grand lettré, académicien du royaume et doyen du mouvement berbère, on retrouve les signatures d’Abdelhamid Zemmouri, ancien ministre et signataire du manifeste de l’indépendance, Driss Benzekri, figure du mouvement des droits de l’homme au Maroc, Ahmed Adghirni, avocat, essayiste et directeur d’un journal berbérophone. Au-delà de son contenu, ce document constitue la plate-forme d’un mouvement naissant dont l’audience potentielle est énorme. Le 12 mai 2000, un noyau de 150 personnes se réunit à Bouznika, petite cité balnéaire près de Rabat, et élit dans ses rangs un " comité du manifeste berbère ". Les quinze personnes qui le constituent se sont partagées le territoire marocain en trois zones, avant d’entreprendre une tournée d’explication. Objectif avoué : lancer un mouvement. Sept réunions sur le thème " Amazighité et politique " ont déjà eu lieu à Agadir, Nador, Meknès, El-Hoceima, Errachidia, Marrakech... et à Gouda, aux Pays-Bas, où des résidents en Europe parmi les signataires du manifeste étaient présents.

Des débats - parfois houleux - se sont ensuivis. Mais si les théories les plus diverses ont été entendues, certaines plutôt de gauche, d’autres un zeste islamisantes, le cœur du sujet est demeuré l’amazighité et les moyens de la promouvoir sur le terrain politique. De nouvelles réunions sont prévues, aux quatre coins du royaume, avant la réunion d’intégration finale prévue du 22 au 24 juin 2001, de nouveau à Bouznika. On attend cinq cents " représentants de régions " et une plate-forme politique et organisationnelle. Cela semble fort au congrès constitutif d’un parti politique. Est-ce le but poursuivi ? Les avis sont partagés. Certains le préconisent, d’autres proposent une sorte de " front national amazigh ", association à caractère politique qui s’investirait dans le lobbying tous azimuts.

Ce qui est certain, comme le pose le manifeste, c’est que " les associations culturelles n’arrivent plus à endiguer le mécontentement des Berbères ". Il est donc temps de " passer au politique ". Ce qui risque d’inquiéter le pouvoir. Jusqu’à présent, les intentions de Mohammed VI concernant la question berbère sont restées insondables. Mais les chantres de l’arabité, qui se recrutent notamment au parti de l’Istiqlal et à l’USFP (socialiste), n’attendront pas de signal du Palais pour démarrer les violentes incantations habituelles.

Plus le mouvement berbère gagnera en ampleur, plus il y a de chances que ses adversaires pan-arabes agitent le spectre de la discorde. Ils auraient tort. Car la postface du document, judicieusement intitulée " pour prévenir toute interprétation tendancieuse du présent manifeste ", déclare ainsi clairement : " Avec nos compatriotes marocains qui se veulent fiers de leur arabité, comme nous nous voulions fiers de notre amazighité, nous considérons constituer une seule entité et appartenir à une même identité ".

Voilà en quoi ce manifeste est innovateur, voire révolutionnaire. il propose aux Marocains une identité unique qui ne soit plus d’emprunt, qui ne doive rien à une quelconque conquête extérieure : l’amazighité - envisagée non pas en tant qu’appartenance ethnique, mais en tant que culture, la culture originelle de ce pays, creuset dans lequel se sont amalgamés pendant vingt-trois siècles et avec bonheur les apports arabes, grec, romain, phénicien, européen... En clair, l’ouverture sur l’amazighité ne constituerait pas un morcellement, mais bel et bien une clarification identitaire, doublée d’un enrichissement culturel. Dans sa déclinaison politique, le modèle proposé par le manifeste est encore plus attractif. Idée : " Le Makhzen, mode de pouvoir autoritaire qui a tant fait souffrir ce pays, est hérité de vieilles traditions abbassides et omeyyades, bref, arabes moyen-orientales. Il suffit d’observer que tous les régimes arabes fonctionnent sur le même modèle : autoritaire sinon dictatorial, et toujours centré sur la personne du chef. Si nous sondons nos propres traditions ancestrales, nous y trouverons des clés pour avancer plus sûrement et plus sereinement vers la démocratie ". D’après Lahcen Oulhaj, enseignant universitaire et membre du comité du manifeste, " l’amazighité en tant que culture permet de satisfaire tous les préalables philosophico-culturels à la démocratisation de notre pays ". Parmi ces préalables : la " consultation " systématique, en tant que technique d’exercice du pouvoir (la jmaâ, assemblée traditionnelle de notables sans la réunion de laquelle aucune décision ne peut être prise dans le village).

La vision berbère pour demain est celle d’un Maroc réconcilié avec lui-même, ouvert sur le monde et sur les apports de toutes les civilisations. En somme, un Maroc serein et tolérant, plutôt que tendu et divisible. Encore faut-il que le pouvoir consente à changer de paradigme. Ce qui, malheureusement, est loin d’être acquis.


Neuf revendications
Le manifeste berbère du 1er mars 2000, signé par 229 personnalités de la communauté berbère marocaine et plate-forme d’un mouvement politique naissant, liste neuf revendications :

Faire de la question berbère " l’objet d’un débat national le plus large possible, un débat qui serait marqué du sceau de la logique, de la raison, et de la pondération " ;
Amender la constitution, et y inclure le tamazight en tant que langue officielle ;
Faire bénéficier les régions défavorisées du pays - en majorité berbérophones - d’un programme de développement économique prioritaire :
Rendre l’enseignement du berbère, comme celui de l’arabe, obligatoire dans les écoles, collèges, lycées et universités - et créer des instituts en vue de normaliser la tamazight et le doter des outils pédagogiques nécessaires ;
Procéder à " une refonte sérieuse des programmes d’histoire en vigueur dans les établissements scolaires ", qui rétablirait la vérité sur l’histoire occultée du Maroc et notamment sa composante berbère ;
Faire en sorte que les médias publics utilisent le berbère (voire qu’on crée une télévision berbérophone), qu’un corps d’interprètes soit affecté aux tribunaux, hôpitaux et administrations publiques pour aider les populations exclusivement berbérophones à vivre comme des citoyens de plein droit, et que les fonctionnaires de l’État civil n’aient plus le droit de refuser les prénoms berbères à des nouveau-nés ;
Laisser l’art berbère évoluer, au lieu de le garder autoritairement cantonné dans l’espace du folklore ;
Cesser de donner aux rues et aux places les noms de personnes " sans évocation aucune pour la mémoire collective nationale " et de détonner ou d’arabiser les noms de lieux ou de personnages historiques berbères ;
Reconnaître les associations culturelles berbères d’utilité publique afin qu’elles puissent bénéficier de subventions de l’État.


Une communauté éclatée
L’appellation " Berbères " fut d’abord utilisé par les Gréco-Romains pour désigner les habitants de l’Afrique du Nord, dont ils ne comprenaient pas la langue, le terme "barbaros" qualifiant l’étranger à la cité, celui qui ne sait pas parler - ou seulement par des balbutiements - par extension le " sauvage ", le " non-civilisé ", la " brute ". Cette appellation péjorative explique pourquoi les intéressés, sans renier le terme toujours usité dans les pays occidentaux, préfèrent se désigner par des mots tirés de leur propre langue. Ainsi, lorsqu’ils parlent de l’ensemble des groupes berbérophones, se disent-ils " Imazighen " (prononcer imazirène, pluriel d’Amazigh), c’est-à-dire " hommes libres ". Mais comme il existe plusieurs variétés de parlers berbères (taqbaylit, tachaouit, tachelhit, tamazight, tarifit...) et que chaque locuteur a le sentiment très vif de son appartenance à tel ou tel ensemble linguistique, les lmazighen se désignent au quotidien par des appellations régiono-linguistiques : Iqbayliyen (Kabyles), lchawiyen (Chaouis), Ichelhiyen (Chleuhs), Irifiyen (Rifains), Ihaggaren ( Touaregs)...


par Philippe Rekacewicz et Yves Jardin.
Le Monde diplomatique
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S’il est difficile d’avancer des chiffres précis quant à l’importance numérique des populations berbérophones au Maghreb, aucun recensement ne tenant compte de la langue usitée, il est néanmoins possible de brosser une géographie démographique approximative de la berbérité. Le Maroc en dénombre le plus (40 % de la population), soit autour de 12 millions de personnes. Dans certaines zones rurales, cette proportion se situe entre 80 % et 100 %. À chaque région berbérophone correspond un parler déterminé : au Nord, dans le Rif, le tarifit ; au centre, le tamazight ; au Sud-Ouest, le tachelhit.

En Algérie, la Kabylie concentre prés des deux tiers des 6 millions à 7 millions de Berbères que compte le pays (20 % à 25 % de la population totale). viennent ensuite les Aurès où vivent les Chaouis, évalués à 1 million de personnes. Dans la vallée du Mzab, autour de Ghardaïa, les Mozabites, qui se singularisent par leur adhésion au ibadisme, une branche schismatique de l’islam, sont, quant à eux, estimés à 100 000 individus. Enfin, les Zénètes, Berbères noirs d’Algérie vivant dans le Touat Gourara (Sud-Ouest) seraient moins de 50 000. Des îlots de berbérophonie sont disséminés à travers le pays, principalement dans les monts Chenoua, Zaccar et en Oranie

Le troisième grand ensemble berbérophone est constitué per les Touaregs. Ils seraient prés de 1 million répartis principalement entre le Niger (environ 500 000), le Mali (entre 300 000 et 400 000), l’Algérie, la Libye et le Burkina. On trouve des reliquats de berbérophonie en Tunisie (autour de 50 000 personnes à Djerba et dans une dizaine de villages du Sud), en Tripolitaine (une dizaine de milliers dans les régions de Zouara et du Djebel Nefoussa), en Mauritanie méridionale où la région de Zenaga en abrite entre 5 000 et 10 000, de même que dans l’oasis égyptienne de Siwa. Au total, plus de 20 millions de berbérophones sont disséminés sur un territoire de 5 millions de km², de la frontière égypto-libyenne aux îles Canaries et de la Méditerranée jusqu’au-delà du fleuve Niger. La fragmentation géographique des lmazighen ne contribue pas à donner une homogénéité à leur revendication commune. Et ce, en dépit de leur poids démographique considérable.

A.Gh.
 
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