Re : Rien à la Télé marocaine !!!
Une analyse assez pertinente. Mais nous ne devons pas être de mauvais joueurs. Tout le monde criait à la discrimination à travers l'absence d'une chaine amazigue dans l'espace audio-visuel marocain. Maintenant qu'ils vont la créer on les attaque déjà, avant meme qu'il n'y'ait rien encore. disons quand meme bravo à cette création de cette chaine. ensuite quand la diffusion débutera, on entamera la critique des programmes.
Il me semble que ça décrit très bien ce qu'on va avoir. Mais bon
http://www.tamazgha.fr/article.php3?id_article=2063
Les Kabyles ont subi la télévision algérienne pendant 40 ans. Ils ne comprenaient pas la langue arabe, ils vomissaient la propagande politico-religieuse de l’Etat, ils avaient du mal à supporter les interminables témoignages des moudjahidines, ils dénonçaient la censure des films... Bref, une télévision qui les énervaient plus qu’autre chose.
Pendant tout ce temps, les Kabyles, frustrés, rêvaient d’une télévision kabyle et en kabyle. Ils l’imaginaient sans doute culturelle, laïque, scientifique, progressiste... Ils rêvaient de débats politiques contradictoires, d’émissions philosophiques..., ils rêvaient surtout de se débarrasser de la pensée unique et de la propagande arabo-islamique.
Les Kabyles ont rêvé de toute leur force d’une télévision kabyle, ils en ont tellement rêvé que le grand jour est enfin arrivé : la télévision kabyle est née ! Tout le monde est content. La majorité des Kabyles s’est abonnée. Certains pour consommer, d’autres plus pour la soutenir.
Après quelques années d’existence, la télévision kabyle continue de bénéficier de l’adhésion totale des téléspectateurs kabyles, au point que même les plus avertis évitent d’émettre ne serait-ce-que la moindre critique afin de ne pas perturber la marche de cette belle entreprise ô combien fragile.
Passons l’aspect technique, quoique insuffisant, le bon sens n’exige rien de la chaîne nouvellement créée. On sait que pour avoir une grande chaîne de télévision, il faut de gros moyens. En revanche, les émissions que la chaîne propose et les thèmes qu’elle développe sont aux antipodes de ce dont les Kabyles ont rêvé.
La chaîne de télévision kabyle a fini, après quelques années de diffusion, par reproduire les mêmes thèmes que la télévision algérienne, tant décriée. Elle nous présente le journal télévisé dans une langue kabyle approximative avec de longues phrases truffées de calques. Elle produit des émissions improvisées sans aucun intérêt, dans lesquelles elle donne la parole à des quidam qui n’ont rien à dire et qui nous chauffent les oreilles avec des
salamalek du genre "je dédie cette chanson à...", "je passe bonjour à...", et ils se lancent dans des listes de noms interminables. Véritables opérations
chien de Pavlov. On tend le micro aux gens et on les démarre au quart de tour : "nous espérons que...", "nous remercions...", "inchallah...", "pendant la guerre...", "bienvenue à BRTV...", "nos traditions sont...", "chante nous un achewiq...", "nous avons égorgé deux bœufs..."
"Deux bœufs ! Dites-vous ?" "Oui. Deux bœufs !" Et on nous montre les deux bœufs, ligotés, puis égorgés, sous le regard des petits enfants. Ensuite, ils partagent la viande avant de mettre la tête de la bête, dégoulinante de sang, aux enchères. Tout cela sous les youyous des femmes. Quant aux hommes, ils prennent le micro, fiers d’avoir égorgé deux bœufs, ils se caressent la moustache en lançant des défis, en sourdine, aux autres villages : "Qui peut mieux !?" Et c’est parti. A qui va se ruiner plus que l’autre en s’achetant le maximum de bœufs ? On croit voir un documentaire anthropologique relatant les rites des sociétés primitives, avec tout le respect que je dois à ces dernières.
Sans oublier les émissions sur les saints, la profusion des prêches religieux à travers les chants des
khouanes, les circoncisions collectives, les constructions de mosquées ostentatoires, des sitcom avec des actrices voilées parlant kabyle banalisant ainsi le port du voile islamique en Kabylie, et j’en passe et des plus tristes.
Il y a quelques mois, BRTV a diffusé une émission de "Fête de fin d’année dans une école primaire en Kabylie". La fête a commencé par une série de sourates coraniques, scandées par un enseignant (version mosquée), suivie de la levée de drapeau et de
Qasaman (version officielle caserne militaire), chantée par les élèves, avant de laisser la place aux petites filles kabyles, vêtues de robes de circonstance, appelées à danser et à chanter en langue locale. (Un peu de folklore kabyle, après deux formules de soumission Coran-Qassaman, ne fait pas de mal à l’unité nationale et à l’unité religieuse.)
La cerise sur le gâteau, c’est le programme "Spécial Ramadhan". Il ne manque que le muezzin. Tout y est : des soirées, des jeux, des films, de la cuisine orientale, des documentaires religieux, des chants religieux... Il y a même des causeries religieuses. Ces dernières sont plus perverses que celles de la télévision algérienne, car elles sont en kabyle et leurs présentateurs, se cachant dans des costumes cravates, poussent le culot jusqu’à appuyer leurs discours avec des citations de Slimane Azem.
Voici la triste réalité de la télévision kabyle. Du rêve, on en a fait un véritable cauchemar. On a finalement, à notre corps défendant, intériorisé tous les travers de ceux qu’on a dénoncé pendant toutes ces années de résistance à l’idéologie dominante. Où sont les émissions culturelles ? Les émissions scientifiques ? Les débats contradictoires tant promis ? Nada. ENTV, BRTV, c’est Hamoud Boualem et Boualam Hamoud.
Ce sont deux chaînes au même contenu séparées par la même pensée islamique.
Je sais que beaucoup de gens me diront : "Toi qui critique notre télévision, essaye de faire mieux !" Moi je leur dis que BRTV est libre de faire ce qu’elle veut, mais de mon côté je suis libre d’en parler, car je suis Kabyle et, de plus, je paye mon abonnement. Par conséquent, il est de mon devoir d’alerter l’opinion kabyle sur le danger du contenu de cette chaîne, en l’occurrence, la folklorisation de la culture kabyle que nous, pauvres téléspectateurs, accompagnons, en robe de fête et tambour battant, vers le cimetière des peuples oubliés.
Yugurten at Uberkan.